Glossaire
Associations
économiques
Rudolf Steiner se met un jour à proposer une forme associative
pour le rapport strictement économique qu'il place par
ailleurs aussi sous l'outil du contrat souvent vu à tord
comme juridique ( ces rapports d'égalité de droit
autour de la loi - au cas où le sentiment du droit
s’avérerait défaillant et était lésé - et du
rapport de conseil - ou du rapport à une autorité alors
changeante - des rapports de connaissance et d'exercice
des facultés individuelles dans la vie
spirituelle-culturelle).
Manque de chance, nous autres francophones qui n'avons
déjà pas le terme
"triarticulation" ou "trimembrement" qu'il a fallu
former depuis pour "Dreigliederung", nous avons bien des
associations mais en un concept très très
éloigné pour l'instant. Il revient la
plupart du temps à porter l'accent plus sur le rapport
de droit dans la vie de l'esprit, que sur ce que
celle-ci devrait être par elle-même. Et ce premier
obstacle à cette vie en France, verrouille en même temps
un abord non entaché de juridisme à la maîtrise de
l'économie, troisième condition d'une vie de l'esprit
qui ne soit pas contingente des deux autres à l'avenir.
En effet, une association est pour nous, francophones,
cette vie associative à but non lucratif (et
donc justement pas celle des rapports économiques). Elle
est régie encore aujourd'hui par la loi de 1901 (voulant
notamment aussi clarifier le statut des congrégations
religieuses en préparant celle de 1905 sur la séparation
de l’Église et de l’État).
C'est donc toute une histoire d'émancipation
loin d'être terminée face à l'ordre ancien dominé par le
clergé qui converge dans cette liberté d'association
qui n'existait pas sous l'ancien régime.
Pour la France, on se rafraîchira la mémoire par les
liens ci-dessous :
- https://www.conseil-constitutionnel.fr/centenaire-loi-1901-relative-au-contrat-d-association/historique-de-la-conquete-du-droit-d-association
- https://www.cava49.org/lhistoire-des-associations/
Celle-ci est encore loin d'être aboutie, et
semble rester en France comme coincée dans un affect de
fière prétention universaliste en réalité encore telle
que peut l'être une crise d'adolescence en sa phase
d'opposition.
Ce chemin d'émancipation, se fait aussi dans les
contrées germanophones, bien que sur un mode
sensiblement différent, avec une sorte de réserve, de
distance. J'ai traduit pour cela la page allemande de
Wikipedia correspondante ( https://de.wikipedia.org/wiki/Verein ) , où après l'aspect
historique, on trouvera aussi la description des
évolutions récentes selon les États afin de pouvoir
prendre surtout conscience des différences entre groupes
humains :
- Verein =
association, vu par les germanophones
Pour les germanophones de l'époque comme d'aujourd'hui
donc, parler d'association (entre individus), ou
d'associations (leurs regroupements) ne renvoi donc pas
aussi fortement qu'en France à tout le complexe de droit
visant à libérer et émanciper les regroupements à but
d'une vie de l'esprit non forcément religieuse, comme
aussi à celle politique et citoyenne (le règlement de
compte entre faction semble moins fort). Pour eux cela
concernait les différentes formes d'unions,
d'unifications, société, communautés, fraternités,
rassemblements, ligues, corporations, fédérations etc...
Et probablement pas vraiment non plus à ce que nous,
francophones appelons donc des associés quand il
s'agit de faire des gains. N'est-il pas curieux que
notre langage courant ne parle jamais d'associés pour
les membres d'une association, mais bien plutôt pour des
associés dans une forme économique construite autour de
la possession du capital.
Or la définition de 1901 se distingue justement d'avec
ce but en spécifiant clairement de s'unir et se
rassembler SANS BUT LUCRATIF ! Il semble bien se
créer là 2 ordres juridiques distincts (à vérifier). En
tout cas plus distincts que ça ne l'est encore
aujourd'hui dans les pays germanophones où l'on peut par
exemple, dans l’équivalent d'une Sàrl (forme
exclusivement commerciale/lucrative en France) se voir
reconnaître par le fisc, des activités à but non
lucratif et les facilités fiscales correspondantes,
notamment concernant l'encaissement de dons.
En Suisse, les formes juridique types pour le
regroupement de personnes (pouvant ouvrir à une capacité
juridique) en vue d'un but commun seraient au nombre de
huit (voir Les huit formes de sociétés selon le
droit suisse ) certaine plus appropriées à
une activité "désintéressée" d'autres plus pour partager
des "intérêts" économiques...
C'est donc pénétrer dans un univers très différencié que
d'affiner les représentations pour chaque appellation
courante de regroupement, puis chaque forme juridique
correspondante (elles ne correspondent pas toujours),
selon chaque ordre ou État de droit. Un vrai casse tête
déjà rien que pour le traducteur ! (il faut d'ailleurs
voir comment les robots de traduction automatique s'y
perdent aussi)
C'est donc dans ce contexte là que R. Steiner tente de
développer une nouvelle forme de regroupement qui serait
purement économique au sens de permettre des
échanges "prestations" contre "prestations" strictement
équilibrés économiquement et donc sans privililèges
institués dans le droit possibilité, ni possibilité
d'une concentration de pouvoir par la propriété de
"domination de choses" inaugurée dans l'histoire dans la
notion même de droit. Celle-ci fut élaborée dans la Rome
antique et le travail tarifé sous forme de salariat en
participe aussi. Si cela avait alors déjà permis
le progrès de pouvoir émanciper de l'esclavage,
cela n'a en perdurant jusqu'à aujourd'hui, pas
encore fait sa place à ce qu'apporta cependant de
central le mystère du Golgotha et emprunta notamment le
chemin du christianisme.
Un immense changement de fond, qui somme toute porterait
donc plus loin, sur son véritable terrain économique ce
que les Lumières et les Républiques depuis la Révolution
française ont confiné à la sphère politico-juridique de
domination bourgeoise, le voyant d'abord dans la
propriété, pour peu de temps après dans l'idéal de
fraternité, qui reste cependant un "à venir" encore mal
cerné et désigné en référence à des formes d'ancien
régime : les fraternités et les liens de sang.
En son temps Steiner, distingue aussi parmi les
mouvements syndicaux principaux en Europe, le français
comme le plus proche, dans sa composante
autogestionnaire (non encore fortement réprimée alors
comme depuis les années 70), de sa triarticulation. Y
aurait-il là un lien avec son choix pour désigner par
"associative" cette forme (de conscience ?) encore à
venir ?
Qui sait, peut-être viendra-t-il un temps où les
regroupements économiques associatifs, même ceux de ce
qu'on appelle en France, l'économie sociale et
solidaire, seront aussi de fait vraiment "à but non
lucratifs". Car au fond, on s'associera alors non plus
pour détenir du capital, mais quelque soit l'initiative
ou l'entreprise, pour le gérer au meilleurs des facultés
et des besoins de chacun.
Mais pour cela, il faut encore, que dans le courant
évolutif, après avoir commencer à surmonter le
théocratique d'une ancienne vie de l'esprit hégémonique,
par le droit démocratique s'organisant en État, on
surmonte ce dernier pour accéder à ce que Steiner appela
l'associatif dans le rapport économique.
Voir à cette fin ce qui pourrait se dégager des
compilations revues à
partir de la collection 4.
François Germani, v. 01,
12/12/2025
***
L'entrée allemande ci-dessous date un peu ( vers 2012 ),
nous devrions tenter d'en faire une plus actualisée.
Mais cette question des associations économiques, si
elle s'est enrichie depuis, reste difficile et délicate
à développer dans un ordre actuel dominé quasi
spirituellement par le règne d'une concentration
croissante de l'oligarchie économique façonnant les
autres domaines.
On ne mesure généralement pas à quel point nos
façons de faire quotidiennes, nos commodités
quotidiennes en quelque sorte, en portent la marque
jusqu'au fléau médiatico-pandémique qui a aussi fait des
morts et des malades (plus que la "nature" et les
guerres habituelles nécessaires à la pensée économique
en place ?). Nous voici donc, pour l'instant, ballottés
entre les conservatismes rassurants et les prolongements
programmés de la technicité dominante rentable.
FG - 05/2022
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D003 - Associations
économiques
Définition
et
délimitation
Une association est un regroupement de
consommateurs, de commerçants et de producteurs dans
le but d'influencer les prix de manière à ce que
toutes les parties concernées puissent s'en sortir.
Une association est donc une association d'intérêts
inégaux.
Par une telle mise en réseau des acteurs
économiques sera tenté d'accumuler autant
d'expériences afin que l'économie puisse être
activement façonnée. Quand il s’agit de façonnement
des prix, le jugement de l'individu ne suffit pas
pour obtenir un résultat qui satisfasse tout le
monde. Ce qui est nécessaire ici, c'est un jugement
collectif. Cela la vie de l’économie l’a en commun
avec la vie de droit. Les deux diffèrent à leur tour
de la vie de l’esprit, où l'individu peut parvenir
aussi seul à des jugements pertinents.
Autrement que des cartels et des agences, les
associations ne se font pas aux dépens des
consommateurs parce que ceux-ci sont directement
impliqués dans toutes les décisions. Il n'est donc
plus nécessaire de recourir à l'ancienne législation
anti-trust et anti-monopoles, qui vise à assurer la
protection des intérêts des consommateurs par
l’intervention des autorités de l'État. Les
associations le font au sein même de l'économie.
A l'inverse, l’expression associations veut dire
que - contrairement aux coopératives de
consommation- les consommateurs ne tentent pas de
prendre le contrôle direct sur le commerce et la
production. Il ne s'agit pas d'un changement de
domination, mais de l'équilibrer/la compensation des
intérêts économiques par des contrats équitables.
Tâches
et
moyens
Pour adapter l'offre de marchandises et de
prestations aux besoins afin que les consommateurs
puissent aussi se permettre les produits requis, les
associations agissent sur le nombre d'occupés dans
les branches respectives. Si un produit devient trop
bon marché pour les producteurs, ils doivent devenir
moins nombreux. Ils seront alors utilisés dans
d'autres branches dont les produits sont encore trop
chers pour les consommateurs en raison de
l'insuffisance de l'offre. Le changement structurel
est ainsi consciemment conduit par les acteurs
économiques eux-mêmes, sans attendre que le marché -
comme dans la théorie d'aujourd'hui - le fasse par
lui-même ou - conformément à la pratique
d'aujourd'hui - le laisse à un état complètement
surchargé.
En outre, la politique monétaire ainsi nommée
compte aux tâches d’une économie associative. Elle a
à veiller à ce que la valeur extérieure de la
monnaie se stabilise à un niveau qui n'entrave ni
les importations ni les exportations. Afin d'adapter
dynamiquement la masse monétaire à l'économie
réelle, les associations laissent l'argent vieillir
aussi vite que les moyens de production. Si les
moyens de production ne sont pas remplacés, il n'y a
plus rien à échanger. L'argent perd sa valeur. Les
deux - moyens de production et argent - doivent donc
être renouvelés en temps utile afin de conserver
leur valeur. L'argent a une durée de validité.
Si des entreprises individuelles essaient d'agir
sans les associations, alors - dans la mesure où
aucun accord mutuel n'a été négligé/dédaigné - le
pouvoir de l'État ne peut pas être utilisé pour les
mettre en conformité avec la ligne associative. Au
lieu de cela, les associations existantes doivent
compter sur leur pouvoir économique et recourir au
seul moyen coercitif légitime de l'économie, le
boycott. Contrairement à la grève, le boycott
protège les consommateurs, qui sont la véritable
cause de toute l'activité économique.
Chemins
vers
l’association
Étant donné qu'une association est
principalement axée sur le réseautage, Steiner
insiste sur le fait que les associations ne
devraient pas tant être fondées que rassemblées.
Cela signifie que sous circonstances aucune nouvelle
entreprise devra être crée, mais seulement
rassemblées des entreprises existantes.
Aussi petite qu'une telle association puisse
être au départ, la priorité est toujours d'unir des
intérêts inégaux. Comme l'accent est aujourd'hui mis
unilatéralement sur les producteurs, il s'agit donc
d'abord et avant tout d'une confrontation avec les
intérêts des consommateurs. Quiconque veut effectuer
quelque chose ici n'a aucun autre choix que de
mettre à genou les grands groupes par le biais d'un
boycott généralisé et de donner son argent aux
producteurs qui se montrent plus coopératifs.
Les tentatives associatives jusqu’à présent,
comme celle de Demeter, souffrent du choix encore
arbitraire de représentants des consommateurs et de
l'absence d'autres producteurs. Une association,
c'est aussi se réunir avec ses concurrents
–naturellement sous la surveillance des
consommateurs. Cette perspective supplémentaire doit
toujours être présente et chaque occasion devra être
saisie, sinon les associations présumées
dégénéreront en un instrument de fidélisation de la
clientèle.
L'un des moyens recommandés par Steiner - bien
qu'indirect - pour une économie associative est la
création d'unions professionnelles qui évitent
strictement toute question de salaire et autres
questions financières afin de permettre à leurs
membres de développer une éthique professionnelle
forte. De cette façon, l'ambition qui est autrement
mise en concurrence économique est renvoyée là où
elle appartient réellement - c'est-à-dire dans le
purement technique - c'est-à-dire le spirituel. Elle
ne s’oppose alors plus à une mentalité associative à
l’intérieur de l'économie.
Sylvain Coiplet
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