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Institut pour une triarticulation sociale
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GA337b - Œuvres complètes de Rudolf Steiner - IDÉES SOCIALES, RÉALITÉ SOCIALE, PRATIQUE SOCIALE




SIXIÈME SOIRÉE DE DISCUSSION
Dornach, 30 août 1920 -
L'ARTISTE DANS L'ORGANISME SOCIAL TRIARTICULÉ
SECHSTER DISKUSSIONSABEND
Dornach, 30. August 1920 -
DER KÜNSTLER IM DREIGLIEDRIGEN SOZIALEN ORGANISMUS

 


 

Les références Rudolf Steiner Œuvres complètes ga 337b 097-109  1999 30/08/1920



Original





Traducteur: FG v.04 - 2022 Editeur: SITE
Comment la question après la relation entre l'art et la vie sociale doit être correctement posée. Tri-articulation sociale comme une condition préalable à l'épanouissement de l'artistique. Le dédommagement de l'artiste au sens de la cellule sociale primordiale. Génialité comme condition préalable à l'art véritable. Les non-concepts « impressionnisme » et « expressionnisme ». Parler sur l'art ne va pas sans sentiment artistique. Sans philistrosité pas de génialité.


Wie die Frage nach dem Verhältnis von Kunst und sozialem Leben richtig gestellt werden muß. Die Dreigliederung als soziale Voraussetzung für das Aufblühen des Künstlerischen. Die Entschädigung des Künstlers im Sinne der sozialen Urzelle. Genialität als Voraussetzung für wirkliche Kunst. Die Unbegriffe «Impressionismus» und «Expressionismus». Reden über Kunst geht nicht ohne künstlerisches Fühlen. Ohne Philistrosität keine Genialität.

Ernst Uehli s'exprime en introduction sur le thème "L'artiste dans l'organisme social triarticulé". Une discussion s'ensuit, au cours de laquelle Paul Baumann pose la question à Rudolf Steiner :

01

Ernst Uehli spricht einleitend über das Thema «Der Künstler im dreiglied­rigen sozialen Organismus». Anschließend findet eine Diskussion statt, in deren Verlauf Paul Baumann an Rudolf Steiner die Frage stellt:

Paul Baumann : Quel est le rapport entre l'artiste, respectivement sa prestation de travail, et la cellule sociale originelle ? N'a-t-il pas aussi des prestations de travail à fournir pendant les périodes de préparation ?

02

Paul Baumann: In welchem Verhältnis steht der Künstler beziehungswei­se seine Arbeitsleistung zur sozialen Urzelle? Hat er nicht auch Arbeits­leistungen zu erbringen in Zeiten der Vorbereitung?

Rudolf Steiner : Lorsqu'il s'agit de l'art et de la vie sociale, j'ai toujours un certain sentiment d'insatisfaction lors d'une discussion concernant ces deux choses, pour la simple raison que déjà toute la façon de l'attitude de la pensée, de l'attitude de l'âme, qui entre en ligne de compte lorsqu'on parle de façonnement social, de structure sociale, doit être quelque peu différente de celle que l'on doit avoir lorsqu'on parle de l'art, de sa juste origine dans la nature humaine et de sa mise en valeur dans la vie, devant les humains.

03

Rudolf Steiner: Wenn es sich um Kunst und soziales Leben han­delt, so habe ich eigentlich immer ein gewisses unbefriedigendes Gefühl bei einer diese beiden Dinge betreffenden Diskussion, aus dem einfachen Grunde, weil schon die ganze Art der Gedanken­einstellung, der Seeleneinstellung, die in Frage kommt, wenn man von sozialer Gestaltung, von sozialer Struktur spricht, eine etwas andere sein muß als diejenige, die man haben muß, wenn man von Kunst, von ihrem richtigen Hervorgehen aus der Menschen­natur und ihrer Geltendmachung im Leben, vor den Menschen reden soll.

Dans un certain sens, les deux domaines ne sont pas vraiment comparables. Et c'est précisément parce qu'ils ne le sont pas - non pas parce qu'ils le sont, mais parce qu'ils ne le sont pas - qu'il me semble que l'on peut éclairer toute la position de l'art par rapport à l'artiste et à l'humanité, précisément du point de vue de la triarticulation de l'organisme social. Lorsque l'on parle de l'art dans l'organisme social, il ne faut pas oublier un seul instant que l'art fait partie des plus hautes fleurs de la vie humaine et que tout ce qui est nuisible à l'art ne peut pas être compté parmi les plus hautes fleurs de l'organisation de la vie humaine. Et c'est ainsi qu'il faut dire : s'il est possible à un organisme social triarticulé de façonner la vie en général de telle sorte que l'artiste et l'art puissent émerger de cette vie, ce sera une certaine épreuve pour la justesse, et aussi pour la justification interne de la triarticulation de l'organisme social. Mais on ne pourra pas bien se poser la question : comment faut-il aménager l'un ou l'autre aspect de l'organisme social triarticulé pour parvenir à une gestion correcte de l'art ou à une mise en valeur correcte de l'artiste ? Avant toute chose, la question se pose : comment les humains vont-ils vivre dans l'organisme social triarticulé ? On peut dire que si l'idée de la triarticulation de l'organisme social était une idée utopiste quelconque, on pourrait naturellement dire ce que l'on dit des utopies : les humains vivront heureux - aussi heureux qu'il est possible de l'être. - Or, l'idée de la triarticulation de l'organisme social ne part pas du tout de telles conditions utopistes, mais elle demande simplement : quelle est la structure conforme à la nature, la structure évidente de l'organisme social ?

04

In einer gewissen Beziehung sind die beiden Gebiete miteinan­der nicht recht vergleichbar. Und gerade weil sie das nicht sind —nicht, weil sie es sind, sondern weil sie es nicht sind — scheint mir, daß man gerade vom Gesichtspunkte der Dreigliederung des sozia­len Organismus die ganze Stellung der Kunst zum Künstler und zur Menschheit beleuchten kann. Wenn man allerdings von der Kunst im sozialen Organismus spricht, so sollte man keinen Augenblick vergessen, daß die Kunst zu den höchsten Blüten des menschlichen Lebens gehört und daß der Kunst alles schädlich ist, was an ihr so ist, daß man es nicht zu den höchsten Blüten der Ausgestaltung des menschlichen Lebens rechnen kann. Und so muß man sagen: Wird es einem dreigliedrigen sozialen Organismus möglich sein, das Leben im allgemeinen so zu gestalten, daß Künst­ler und Kunst aus diesem Leben hervorgehen können, so wird dies eine gewisse Probe für die Richtigkeit, auch für die innerliche Be­rechtigung der Dreigliederung des sozialen Organismus sein. Aber es wird sich nicht gut die Frage stellen lassen: Wie muß man das eine oder andere einrichten im dreigliedrigen sozialen Organismus, um zu einer richtigen Kunstpflege oder zu einem richtigen Gel­tendmachen des Künstlers zu kommen? Vor allen Dingen wird ja die Frage sein: Wie werden die Menschen leben im dreigliedrigen sozialen Organismus? Man kann sagen: Wäre die Idee von der Dreigliederung des sozialen Organismus irgendeine utopistische Idee, so würde man natürlich sagen können, was man von Utopien sagt: Die Menschen werden glücklich leben — so glücklich, als es nur sein kann. — Nun geht ja die Idee der Dreigliederung des so­zialen Organismus gar nicht von solchen utopistischen Bedingun­gen aus, sondern sie fragt einfach: Wie ist die naturgemäße Struk­tur, die selbstverständliche Struktur des sozialen Organismus?

On pourrait donc bien se représenter qu'un humain quelconque ait l'idée que l'humain en tant que tel pourrait être beaucoup plus beau qu'il ne l'est, et que la nature n'a pas vraiment tout fait pour rendre l'humain suffisamment beau. Oui, mais comme le monde est dans son ensemble, l'humain a dû devenir ce qu'il est. Il se peut bien sûr qu'un Lénine ou un Trotski dise que l'organisme social doit être comme ceci ou comme cela. - Mais cela n'a aucune importance. Il n'est pas non plus important que quelqu'un se représente une autre nature de l'humain que celle qui peut naître de l'ensemble de la nature. Ce qui compte, ce sont les lois internes que doit avoir l'organisme social. Et si l'on comprend l'organisme social triarticulé d'un point de vue tout à fait pratique, on peut déjà gagner une représentation de ce qui sera possible dans cet organisme social triarticulé. Avant tout, une certaine utilisation économique du temps sera possible dans l'organisme social triarticulé, sans que l'on ait besoin d'une obligation de travailler ou d'autres belles choses de ce genre, qui éradiqueraient complètement toute liberté. Il sera tout simplement impossible, grâce aux choses qui se produiront dans l'organisme social triarticulé, que tant d'humains traînent inutilement comme aujourd'hui. Je sais qu'avec ces mots "traîner inutilement", on provoque des malentendus, car les gens diront : "Oui, les véritables traînards, les véritables bourlingueurs de la vie, ils sont très peu nombreux. - Mais ce n'est pas cela qui compte, ce qui compte, c'est de savoir si les gens qui font beaucoup font quelque chose d'absolument nécessaire à la vie, s'ils font quelque chose qui s'insère rationnellement, fructueusement dans la vie.

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Man könnte sich ja gut vorstellen, daß irgendein Mensch die Idee hätte, der Mensch als solcher könnte ja viel schöner sein, als er ist, und die Natur habe eigentlich nicht alles getan, um den Menschen schön genug zu machen. Ja aber, so wie einmal die Welt im ganzen ist, so mußte der Mensch so werden, wie er ist. Es kann natürlich sein, daß irgendein Lenin oder Trotzki sagt: Der soziale Organismus muß so und so sein. — Darauf kommt es aber gar nicht an. Ebensowenig kommt es darauf an, ob sich irgend jemand ein anderes Wesen des Menschen vorstellt, als aus dem Ganzen der Natur heraus entstehen kann. Es kommt darauf an, welche inneren Gesetzmäßigkeiten der soziale Organismus haben muß. Und ver­steht man von diesem ganz durch und durch praktischen Gesichts­punkte aus den dreigliedrigen sozialen Organismus, so kann man dann auch schon Vorstellungen gewinnen darüber, was in diesem dreigliedrigen sozialen Organismus möglich sein wird. Vor allen Dingen wird eine gewisse ökonomische Ausnutzung der Zeit mög­lich sein im dreigliedrigen sozialen Organismus, ohne daß man Arbeitszwang oder dergleichen schöne Dinge brauchen wird, die alle Freiheit gründlich ausrotten würden. Es wird einfach unmög­lich sein durch die Dinge, wie sie sich im dreigliedrigen sozialen Organismus ergeben, daß so viele Menschen wie jetzt unnütz her­umlungern. Ich weiß, daß man mit diesen Worten «unnütz herum­lungern» Mißverständnisse hervorruft; denn die Leute werden sa­gen: Ja, die eigentlichen Herumlungerer, die eigentlichen Lebens­bummler, das sind nur sehr wenige. — Darauf kommt es aber nicht an, sondern es kommt darauf an, ob diejenigen Menschen, die viel tun, etwas tun, was unbedingt für das Leben notwendig ist, ob sie etwas tun, was sich rationell, fruchtbar in das Leben hineinstellt.

Si vous saisissez de l'œil aujourd'hui n'importe quelle branche de la vie - je veux tout de suite en soulever une qui est la plus fragile dans la vie d'aujourd'hui - si vous considérez par exemple le journalisme et que vous voyez combien de force de travail humain est nécessaire, depuis le compagnon typographe jusqu'à tous les autres qui sont occupés avec de la réalisation des journaux. Prenez tout cela ensemble qui est fourni là de travail - la plus grande partie de ce travail est effectuée par des bourlingueurs de la vie, car la plus grande partie de ce travail est en fait un travail inutile. On peut faire tout cela de manière plus rationnelle, sans occuper autant d'humains. Il ne s'agit pas de laisser s'occuper le plus grand nombre possible d'humains afin qu'ils puissent vivre, mais de faire en sorte que, dans le sens d'un véritable cours de cycle de vie social, ces emplois nécessaires au bon développement de cette vie, de ce cycle social, soient exécutés. Tout ce qui apparaît aujourd'hui de chaotique en rapport à la valorisation de la force de travail humaine est lié au fait que nous n'avons pas vraiment d'organisme social, mais que nous avons en fait un chaos social provoqué par l'idolâtrie de l'État unitaire. J'ai souvent mis en avant des exemples de ce chaos social. Prenez seulement une fois combien de livres sont imprimés actuellement qui ne se vendent pas à cinquante exemplaires. Maintenant, prenez un tel livre --- combien d'humains sont occupés jusqu'à ce qu'il soit terminé ! Ils ont leurs ressources, mais ils font un travail tout à fait inutile. S'ils faisaient autre chose, ce serait plus intelligent et cela déchargerait d'innombrables autres humains d'un certain côté. Mais c'est ainsi que travaillent d'innombrables typographes, d'innombrables relieurs, ils font des piles de livres - la plupart du temps des poèmes lyriques, mais il y a aussi d'autres choses qui entrent en ligne de compte -, des piles de livres sont fabriquées ; presque toutes doivent être détruites. Mais ces choses inutiles sont nombreuses dans la vie d'aujourd'hui ; d'innombrables choses sont absolument inutiles.

06

Wenn Sie heute irgendeinen Zweig des Lebens ins Auge fassen — ich will gleich denjenigen herausheben, der ja am brüchigsten ist in diesem heutigen Leben —, wenn Sie zum Beispiel den Journalis­mus ins Auge fassen und sehen, wieviel menschliche Arbeitskraft notwendig ist, vom Setzergesellen an bis zu all den anderen, die damit beschäftigt sind, daß Zeitungen zustandekommen. Nehmen Sie all das zusammen, was da an Arbeit geleistet wird — der größte Teil dieser Arbeit wird von Lebensbummlern geleistet, denn der größte Teil dieser Arbeit ist eigentlich unnötige Arbeit. Man kann das alles rationeller machen, ohne so viele Menschen dabei zu be­schäftigen. Nicht darum handelt es sich, daß man möglichst viele Menschen mit etwas sich befassen läßt, damit sie leben können, sondern darum, daß im Sinne eines wirklichen sozialen Lebens­kreislaufes diejenigen Beschäftigungen verrichtet werden, die zu einem gedeihlichen Entfalten dieses Lebens, dieses sozialen Kreis­laufs, nötig sind. Das alles, was heute an Chaotischem entsteht in bezug auf die Verwertung der menschlichen Arbeitskraft, das hängt ja damit zusammen, daß wir eigentlich gar keinen sozialen Orga­nismus haben, sondern wir haben eigentlich ein durch die Ver­götterung des Einheitsstaates hervorgerufenes soziales Chaos. Ich habe oftmals Beispiele hervorgehoben vondiesem sozialen Chaos. Nehmen Sie nur einmal an, wie viele Bücher heute gedruckt werden, von denen keine fünfzig Exemplare verkauft werden. Nun, nehmen Sie solch ein Buch --- wie viele Menschen sind damit beschäftigt, bis es fertig ist! Die haben ihr Auskommen, aber sie machen ganz unnötige Arbeit. Wenn sie etwas anderes täten, wäre es gescheiter, und es würden dadurch unzählige andere Menschen nach einer gewissen Seite hin entlastet. So aber arbeiten unzählige Setzer, arbeiten unzählige Buchbinder, sie machen Stöße von Bü­chern — meistens sind es lyrische Gedichte, es kommen aber auch noch andere Dinge in Betracht —, Stöße von Büchern werden fabri­ziert; fast alle müssen wieder eingestampft werden. Aber solche unnötigen Dinge gibt es viele im heutigen Leben; unzähliges ist absolut unnötig.

Qu'est-ce que cela signifie ? Pensez un instant que notre organisme humain ne serait pas correctement articulé en un système nerveux et sensoriel qui a sa localisation dans la tête, en un système rythmique et un système des membres qui collaborent de manière régulière et par cela œuvrent de manière économique. Pensez un instant que nous soyons un être unitaire qui se mélange partout, où l'on fabrique partout des choses inutiles et qui doit tout évacuer rapidement : les organes d'évacuation dont l'humain dispose aujourd'hui pour des choses inutiles ne seraient pas du tout suffisants. Nous devons en tenir compte. Nous devons être conscients qu'il est important que cet organisme social soit structuré, qu'il soit effectivement organisé intérieurement selon des lois ; alors il sera aussi économique. Alors, le travail humain sera partout à sa place correcte et, avant tout, il ne sera pas exécuté de travail inutile.

07

Was bedeutet das? Denken Sie sich einmal, unser menschlicher Organismus wäre nicht ordentlich gegliedert in das Nerven-Sinnes­System, das seine Lokalisierung im Kopf hat, in das rhythmische und in das Gliedmaßensystem, die in regulärer Weise zusammen­wirken und dadurch ökonomisch wirken. Denken Sie sich einmal, wir wären so ein Einheitswesen, das überall durcheinandergeht, wo überall Unnützes fabriziert wird, das alles schnell wieder ablaufen muß: es würde gar nicht genügend sein, was der Mensch heute an Abflußorganen hätte für unnütze Dinge. Das müssen wir beden­ken. Wir müssen uns klar darüber sein, daß es darauf ankommt, daß dieser soziale Organismus gegliedert, daß er tatsächlich inner­lich gesetzmäßig gestaltet sein muß; dann wird er auch ökonomisch sein. Dann wird die menschliche Arbeit an ihrem richtigen Platze überall stehen, und vor allen Dinge, es wird nicht unnütze Arbeit verrichtet werden.

Qu'en résulte-t-il ? Les humains auront du temps. Et alors, mes chers présents, alors la base est d'abord donnée pour des activités libres telles que l'art et d'autres choses similaires. Pour cela, il faut du temps. Et c'est à partir du temps que viendra ce qui doit être là pour l'art, et l'art œuvrera alors conjointement avec autre chose, il œuvrera conjointement avec la libre vie de l'esprit. Cette vie libre de l'esprit a pour but de développer les talents en même temps que le temps disponible dans l'organisme social triarticulé - non pas d'une manière perverse comme c'est le cas aujourd'hui, mais d'une manière conforme à la nature. Si l'organisme spirituel libre est vraiment séparé des autres organismes, le nombre de génies méconnus diminuera considérablement, car il y aura un développement beaucoup plus conforme à la nature. On s'adonnera beaucoup moins aux rêveries d'un quelconque art et autres choses de ce genre. Donc, l'épanouissement des talents sera simplement placé sur un terrain plus naturel grâce au développement de la libre vie de l'esprit. Et il y a encore autre chose qui est nécessaire si l'art devait s'épanouir : c'est du sens artistique, du besoin artistique, une envie et un désir conforme à la nature des humains pour l'art. Tout cela doit découler de l'organisme social triarticulé, comme ce qui naît justement lorsqu'il y a une cohabitation sociétale organisée, et non chaotique comme aujourd'hui. Vous voyez, c'est surtout à l'époque moderne que nous sommes entrés dans le chaos de la sensibilité artistique. Le sentiment artistique originel, qui jaillit avec une force élémentaire de la connaissance humaine, a totalement disparu sous l'effet de l'éducation moderne. Il reviendrait si nous nous développions dans le sens de la triarticulation de l'organisme social. Et c'est ainsi qu'il faut se représenter l'ensemble de ce qui naît là.

08

Was folgt daraus? Die Menschen werden Zeit haben. Und dann, meine sehr verehrten Anwesenden, dann ist die Grundlage erst gegeben für solche freie Betätigungen, wie es die Kunst und ähn­liche Dinge sind. Dazu gehört Zeit. Und aus der Zeit heraus wird dasjenige kommen, was da sein muß zur Kunst, und die Kunst wird dann mit etwas anderem zusammen wirken, sie wird wirken zusammen mit dem freien Geistesleben. Dieses freie Geistesleben geht darauf hinaus, mit der im dreigliedrigen sozialen Organismus vorhandenen Zeit zusammen die Begabungen zu entwickeln — nicht in dieser perversen Weise, wie es heute der Fall ist, sondern in einer naturgemäßen Weise. Wenn der freie geistige Organismus wirklich von den anderen Organismen abgesondert wird, dann wird die Zahl der verkannten Genies wesentlich abnehmen, denn es wird eine viel naturgemäßere Entwicklung da sein. Man wird viel weniger Träumereien von irgendwelchem Künstlertum und der­gleichen nachgehen. Also, es wird die Entfaltung der Talente ein­fach durch die Entfaltung des freien Geisteslebens auf naturgemä­ßeren Boden gestellt. Und noch etwas anderes ist notwendig, wenn die Kunst sich entfalten soll: es ist künstlerischer Sinn, künstleri­sches Bedürfnis, naturgemäßes Verlangen und Begehren der Men­schen nach der Kunst notwendig. Das alles muß sich ergeben aus dem dreigliedrigen sozialen Organismus heraus als dasjenige, was eben entsteht, wenn ein organisiertes gesellschaftliches Zusammen­leben da ist, nicht ein chaotisches wie heute. Sehen Sie, vor allen Dingen sind wir ja in der neueren Zeit in das Chaos des künst­lerischen Empfindens hineingekommen. Das ursprüngliche künst­lerische Empfinden, das mit elementarer Kraft aus der mensch­lichen Erkenntnis herausquillt, das ist ja unter der modernen Bil­dung ganz und gar verschwunden. Das würde wieder kommen, wenn wir uns im Sinne der Dreigliederung des sozialen Organis­mus entwickeln würden. Und so muß man sich das Ganze, was da entsteht, nun denken.

Si l'on parle du point de vue de l'organisme social triarticulé, on doit parler seulement comme praticien et non en tant que théoricien, on n'a pas permission de demander après les principes, mais après les faits, et là on doit dire que ce que je viens d'évoquer peut arriver beaucoup plus vite qu'on ne le pense. Et qu'est-ce qui apparaît alors ? Des associations apparaissent alors pour les choses les plus diverses - en partie à partir de la vie de l'esprit, en partie à partir de la vie de l'économie. Et on ne devrait en fait pas se représenter ce que feront ces associations, emboîtées dans des paragraphes et des principes. Dans ces associations seront à nouveau des humains qui pourront émettre des jugements à partir de toute la chaleur de la sensibilité et de l'expérience humaines. Il proviendra de ces associations des humains qui, par ce qu'ils font par ailleurs dans la vie, se procureront une certaine importance dans la vie, qui ne leur sera pas garantie par l'État, ni par un titre de conseiller. Que les gens soient conseillers privés de la cour, conseillers d'entreprise, conseillers sanitaires et du genre, ce ne sont pas ces choses abstraites qui leur donneront une valeur dans l'organisme social triarticulé, mais ce qu'ils font, ce qui vit continuellement. C'est par les associations que les choses vivront ; ce ne sont pas les paragraphes qui vivront, mais ce qui résultera des négociations entre les personnes qui ont raison d'être dans les associations ; ce qui résultera, c'est ce qui existe actuellement sous forme de caricature en tant que soi-disant opinion publique. Il suffit de se représenter très concrètement ce qui peut résulter de l'interaction vivante des associations.

09

Man muß ja, wenn man vom Gesichtspunkte des dreigliedrigen sozialen Organismus aus spricht, nur als Praktiker sprechen und nicht als Theoretiker, man darf nicht nach Prinzipien fragen, son­dern man muß nach Tatsachen fragen, und da muß man sagen, das, was ich jetzt angedeutet habe, kann viel schneller kommen, als man denkt. Und was entsteht dann? Dann entstehen für die mannigfal­tigsten Dinge — zum Teil aus dem Geistesleben, zum Teil aus dem Wirtschaftsleben heraus — Assoziationen. Und man sollte eigentlich nicht irgendwie eingeschachtelt in Paragraphen und in Prinzipien sich das vorstellen, was diese Assoziationen tun werden. In diesen Assoziationen werden wiederum Menschen sein, die aus der gan­zen Wärme des menschlichen Empfindens und Erlebens heraus werden Urteile fällen können. Es werden aus den Assoziationen Menschen hervorgehen, welche sich durch dasjenige, was sie sonst im Leben tun, eine gewisse Geltung im Leben verschaffen werden, die ihnen nicht durch den Staat, die ihnen nicht durch einen Ratstitel garantiert wird. Ob da nun die Leute Geheime Hofräte oder Betriebsräte oder Sanitätsräte und dergleichen sind: es werden die Leute aus dem dreigliedrigen sozialen Organismus heraus nicht eine Geltung haben durch diesen abstrakten Dinge, sondern durch dasjenige, was sie tun, was fortwährend lebt. Durch die Assoziationen werden die Dinge leben; es werden nicht Paragraphen leben, sondern es wird sich das ergeben, was die in den Assoziationen mit Recht Geltung habenden Menschen miteinander verhandeln; es wird sich das ergeben, was jetzt in Karikatur vorhanden ist als sogenannte öffentliche Meinung. Man muß sich das nur ganz konkret vorstellen, was durch das lebendige Wechselwirken der Assoziationen zustandekommen kann.

Aux associations, appartiennent aussi celles qui viennent de la libre vie de l'esprit. Oui, il y aura effectivement à nouveau quelque chose dans l'expérience de vie d'un humain, qui peut fixer les choses comme un jugement justifié. Et si vous prenez cela dans sa signification la plus concrète, voici ce qui va se passer : l'artiste pourra vraiment conquérir ce qui est matériel pour son œuvre d'art à partir de ce jugement public, mais qui viendra à validité à partir des associations. C'est à partir de ces conditions que pourra vraiment se développer ce qui permettra à un artiste, même s'il lui faut 30 ans pour réaliser une œuvre d'art, d'en obtenir suffisamment pour satisfaire ses besoins pendant les 30 ans nécessaires à la réalisation d'une nouvelle œuvre - ce qui, de toute façon, n'entre peut-être plus en ligne de compte lorsqu'il a déjà 60 ou 70 ans. Cela se produira. Il en résultera effectivement - si l'on prend toute la chose de manière non banale - que l'artiste pourra être indemnisé pour son œuvre d'art à partir d'un tel organisme social triarticulé au sens de la cellule économique originelle. Aujourd'hui, il ne peut pas être indemnisé pour la raison que là des prix non naturels sont disponibles. En fait, les humains ne peuvent pas payer à l'artiste ce qu'il devrait exiger s'il pense un peu à lui. Mais aujourd'hui, il pense : j'ai réalisé un tableau quelconque, et oui, si je reçois ne serait-ce qu'assez pour les trois prochains mois, alors je le prends - je ne peux bien sûr pas terminer une œuvre correcte en trois mois, mais les gens n'y comprennent rien -, et je pomperai à nouveau dans trois mois.

10

Zu den Assoziationen gehören ja auch diejenigen, die aus dem freien Geistesleben kommen. Ja, da wird tatsächlich wiederum etwas gegeben werden auf die Lebenserfahrung in einem Menschen, die als berechtigtes Urteilen die Dinge festsetzen kann. Und wenn Sie das nur in der ganzen konkreten Bedeutung nehmen, da wird sich folgendes herausbilden: es wird einfach der Künstler wirklich auch materiell für sein Kunstwerk das erringen können aus diesem öffentlichen Urteilen heraus, was aber aus den Assoziationen heraus zur Geltung kommen wird. Es wird sich aus diesen Verhältnissen heraus wirklich das entwickeln können, was möglich machen wird, daß ein Künstler, auch wenn er 30 Jahre lang zu einem Kunstwerke brauchen sollte, dennoch für dieses Kunstwerk soviel bekommen kann, daß er seine Bedürfnisse für die 30 Jahre, die er zu einem neuen Kunstwerke braucht, befriedigen kann — was ja ohnehin, wenn er schon 60 oder 70 Jahre alt ist, vielleicht nicht mehr in Betracht kommt. Das wird sich ergeben. Es wird sich tatsächlich ergeben — wenn man die ganze Sache unbanausisch nimmt —, daß der Künstler aus einem solchen dreigegliederten sozialen Organismus heraus im Sinne der wirtschaftlichen Urzelle für sein Kunstwerk entschädigt werden kann. Er kann heute aus dem Grunde nicht entschädigt werden, weil da so unnatürliche Preislagen vorhanden sind. Eigentlich können die Menschen heute dem Künstler gar nicht das zahlen, was er eigentlich verlangen müßte, wenn er nur etwas kurz über sich denkt. Heute denkt er aber: Ich habe irgendein Bild zustandegebracht, und ja, wenn ich auch nur so viel kriege, daß ich für die nächsten drei Monate genug habe, dann nehme ich das — ich kriege natürlich in drei Monaten kein ordent­liches Werk fertig, die Leute verstehen aber auch nichts davon —, und da pumpe ich eben in drei Monaten wieder.

Maintenant, ces choses-là ne se produiront, j'aimerais dire, que comme l'extrait suprême ; c'est pourquoi on ne peut pas vraiment discuter de ces choses à l'avance. Je trouve toujours que c'est une mauvaise chose de discuter de ces choses - n'est-ce pas, selon le théorème de Pythagore, le carré sur l'hypoténuse est en toutes circonstances égal aux carrés sur les deux cathètes, mais il est impossible, quand on a ce théorème, de parler à l'avance de tous les degrés possibles d'application, mais il sera valable partout. Il en va de même pour l'organisme social triarticulé. Il n'est pas possible de spécifier ce qui doit résulter de l'épanouissement le plus élevé de la vie sociale. C'est pourquoi une discussion sur ces choses est en fait malheureuse, car ce sont des domaines trop disparates - la vie sociale et la vie artistique. Mais si nous prenons les choses en détail, nous devons dire que quelque chose comme ce bâtiment de Dornach devait voir le jour, qu'il devait naître d'une certaine mission culturelle et civilisatrice du présent, de la reconnaissance de cette mission. Et j'aimerais dire : s'il y avait encore moins de personnes ayant la moindre idée de ce qui a été construit, sculpté et peint ici, il aurait quand même dû voir le jour d'une manière ou d'une autre. Mais cette construction n'a bien sûr pu voir le jour que parce que les moyens matériels étaient là, mais elle ne pourra être achevée que si d'autres moyens matériels sont disponibles. On ne peut pas parler de ces questions en disant : oui, quelque chose doit être fait - car le mot "devoir", lorsqu'on parle de ces choses, a au fond quand même une toute autre signification. Et ainsi je pense qu'il faut avant tout être très clair sur le fait que la liberté du mouvement humain, qui est nécessaire pour donner à l'art son fondement correct, sera provoquée par l'organisme social triarticulé. Et ce n'est que lorsque les bases naturelles de la vie sociale seront en place que chaque humain pourra s'enraciner correctement dans cette vie sociale. En fin de compte, il s'agit vraiment plus de la chose que des mots.

11

Nun, diese Dinge werden sich, ich möchte sagen als der höchste Extrakt erst ergeben; deshalb kann man eigentlich nicht gut über diese Dinge von vornherein diskutieren. Ich empfinde es immer als etwas Mißliches, über diese Dinge zu diskutieren — nicht wahr, nach dem pythagoräischen Lehrsatz ist das Quadrat über der Hy­pothenuse halt einmal unter allen Umständen gleich den Quadra­ten über den beiden Katheten, aber es ist unmöglich, wenn man diesen Lehrsatz nun hat, zum vornherein über alle möglichen Gra­de der Anwendung zu reden, aber er wird überall gelten. So ist es auch mit dem dreigliedrigen sozialen Organismus. Es läßt sich das nicht spezifizieren, was sich nun als die höchste Blüte des sozialen Lebens ergeben soll. Deshalb ist eine Diskussion über diese Dinge eigentlich mißlich, denn es sind zu disparate Gebiete — das soziale Leben und das künstlerische Leben. Aber wenn wir nun die Dinge im einzelnen nehmen, so müssen wir sagen: So etwas wie dieser Dornacher Bau, der mußte ja entstehen, er mußte entstehen aus einer gewissen Kultur- und Zivilisationsaufgabe der Gegenwart heraus, aus dem Erkennen dieser Aufgabe. Und ich möchte sagen: Wenn es noch weniger Menschen gäbe, die einen blauen Dunst haben von dem, was hier eigentlich gebaut und gemeißelt und ge­malt worden ist, er hätte doch entstehen müssen in irgendeiner Weise. Dieser Bau hat aber natürlich nur entstehen können, weil die materiellen Mittel da waren, aber er wird nur fertig gemacht werden können, wenn dazu noch weitere materielle Mittel da sein werden. Es läßt sich über diese Fragen nicht so reden, daß man sagt: ja, irgend etwas muß werden —, denn das Muß hat, wenn man von diesen Dingen redet, im Grunde genommen doch eine ganz andere Bedeutung. Und so meine ich: Man sollte vor allen Dingen sich ganz klar darüber sein, daß jene Freiheit der menschlichen Bewegung, die notwendig ist, um der Kunst ihre richtige Grund­lage zu geben, hervorgerufen werden wird durch den dreigliedrigen sozialen Organismus. Und erst, wenn naturgemäße Grundlagen da sind für das soziale Leben, wird jeder Mensch richtig wurzeln können in diesem sozialen Leben. Schließlich handelt es sich da wirklich mehr um die Sache als um die Worte.

Vous voyez, je me souviens par exemple des années quatre-vingt du siècle dernier. Nous étions à l'époque du développement artistique bourgeois extérieur, où le théâtre était dominé par les comédies d'un Paul Lindau, d'un Blumenthal, de ceux qui mettaient sur scène de la paille de comédie, de tragédie ou de théâtre ; nous étions dans la dernière phase, n'est-ce pas, de la peinture conventionnelle et ainsi de suite. À cette époque, un livre a été publié par un humain d'une étroitesse d'esprit sans limite — un humain dont on ne pouvait vraiment pas dire autre chose que : il ne peut être qu'étroit d'esprit, même en le voyant de l'extérieur. - Et ce livre, qu'exigeait-il donc ? Il n'exigeait rien de plus urgent que, oui, que cet art même que nous avons eu là, cet art théâtral, cet art sculptural, cet art musical, etc. — Tout cela n'a pas de fondement social, c'est déraciné, et tout doit à nouveau être formé à partir du social. C'étaient des phrases terriblement belles, mais c'était en fait des choses terriblement tristes, car elles ne prenaient racine nulle part dans la vie. C'est pourquoi j'aimerais déjà dire qu'aujourd'hui, il ne s'agit pas de dire des choses correctes sur de telles choses, mais de ressentir de manière correcte la nécessité réelle de la vie, et cela signifie qu'il faut ressentir la nécessité de la transformation, de la nouvelle formation de la vie. Dans ce domaine, il est donc nécessaire d'attirer l'attention sur le fait que nous devons avant tout sortir de la phrase. Et c'est pourquoi, quand on parle de la triarticulation de l'organisme social, on comprend d'abord cette triarticulation de l'organisme social elle-même; les autres choses se donneront alors.

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Sehen Sie, ich erinnere mich zum Beispiel an die achtziger Jahre des vorigen Jahrhunderts. Wir hatten gerade diejenige Zeit in der äußeren bourgeoisen Kunstentwicklung, wo das Theater be­herrscht wurde von den Lustspielen eines Paul Lindau, eines Blu­menthal, von denjenigen also, die alle so ziemlich lustspiel- oder trauerspiel- oder schauspielmäßiges Stroh auf die Bühne hinsetz­ten; wir hatten die letzte Phase, nicht wahr, der konventionellen Malerei und so weiter. Dazumal erschien ein Buch von einem gren­zenlos bornierten Menschen -- einem Menschen, von dem man nun wirklich schon, wenn man ihn äußerlich sah, nicht anders sagen konnte als: der kann nur borniert sein. — Und dieses Buch, was forderte es denn? Es forderte nichts Dringlicheres als, ja, als eben diese Kunst, die wir da gehabt haben, diese Theaterkunst, diese Bildhauerkunst, diese musikalische Kunst und so weiter. -- Alles das hat keinen sozialen Grund und Boden, das ist entwurzelt, und es muß alles wiederum aus dem Sozialen heraus gebildet werden. Es waren furchtbar schöne Phrasen, aber es war eigentlich furcht­bar trostloses Zeug, denn es wurzelte nirgends im Leben. Und deshalb möchte ich schon sagen: es kommt heute nicht darauf an, daß man über solche Dinge Richtiges sagt, sondern daß man in der richtigen Weise aus der wirklichen Lebensnotwendigkeit heraus empfindet, und das heißt: Man muß empfinden die Notwendigkeit der Umwandlung, der Neubildung des Lebens. Das macht es gera­de auf diesem Gebiete notwendig, den Blick darauf zu lenken, daß wir vor allen Dingen aus der Phrase heraus müssen. Und so handelt es sich darum, daß, wenn man von der Dreigliederung des sozialen Organismus spricht, man diese Dreigliederung des sozialen Organismus zunächst selbst versteht; die anderen Dinge, die werden sich dann ergeben.

Je crois qu'au fond, on parle déjà de l'art de manière incorrecte, si on parle absolument beaucoup de lui. Dans l'art, on devrait peindre, dans l'art, on devrait sculpter, dans l'art, on devrait construire, mais on devrait en fait parler le moins possible sur l'art. Bien sûr, il y a certaines façons de parler de l'art, mais cela doit être quelque chose d'artistique. Il existe bien sûr aussi un art des pensées. Il y a donc quelque chose d'aussi légitime dans les œuvres d'art de la pensée que dans les autres arts, l'art de la peinture et ainsi de suite. Mais ce qui est produit artistiquement est quand même - si l'on considère la création - quelque chose dont on ne peut pas dire qu'il doit être produit de telle ou telle manière ou qu'il doit être reçu de telle ou telle manière, mais là, toute la nécessité de la vie doit se transformer en une sorte d'évidence. Il est nécessaire de se familiariser avec l'idée que s'il n'y a pas de génie, il ne peut pas y avoir d'art correct. - Dans ce cas, toutes les discussions sur la manière dont l'organisme social doit être organisé pour que l'artiste soit mis en valeur de la bonne manière ne servent à rien. On peut alors tout au plus dire : dans un organisme social qui sinon va quand même correctement, il y aura un art correspondant s'il y a le plus de génies possible ; alors il y aura déjà un art correct. - Mais ils doivent d'abord être là, ces génies. Et comment ils doivent se mettre en valeur - eh bien, il est certain que la vie de certains humains de génie est extraordinairement tragique, mais que les génies puissent vraiment agir dans le monde, que les génies puissent se mettre en valeur selon les dispositions qu'ils ont reçues à la naissance, cela ne peut se produire que dans une libre vie de l'esprit, car c'est seulement là qu'il y aura une véritable vie de l'esprit.

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Ich glaube, daß man im Grunde genommen von der Kunst schon unrichtig redet, wenn man überhaupt viel über sie redet. In der Kunst sollte man malen, in der Kunst sollte man meißeln, in der Kunst sollte man bauen, aber man sollte eigentlich über die Kunst möglichst wenig reden. Sicher, es gibt gewisse Arten, über die Kunst zu reden, aber das muß dann selbst wiederum etwas Künstlerisches sein. Es gibt ja natürlich auch eine Gedankenkunst. Es wird also in Gedankenkunstwerken irgend etwas ebenso Berechtigtes aufgebaut wie in den anderen Künsten, der Kunst der Malerei und so weiter. Aber dasjenige, was künstlerisch hervorgebracht wird, ist denn doch — wenn man das Schöpferische ansieht — etwas, wovon man nicht sagen kann, es solle so oder so hervorgebracht werden oder es solle so oder so entgegengenommen werden, sondern da muß alle Not­wendigkeit des Lebens sich in eine Art von Selbstverständlichkeit verwandeln. Es ist schon notwendig, daß man sich eben auch ver­traut macht zum Beispiel mit dem Gedanken: Wenn halt kein Genie da ist, so kann es keine ordentliche Kunst geben. — Da nützt dann alles Diskutieren darüber, wie der soziale Organismus gestaltet sein soll, damit der Künstler in der richtigen Weise zu Geltung komme, nichts. Man kann dann höchstens sagen: In einem sonst doch or­dentlich gehenden sozialen Organismus wird eine entsprechende Kunst da sein, wenn möglichst viele Genies da sind; dann wird schon die richtige Kunst da sein. — Die müssen aber erst da sein, diese Genies. Und wie sie zur Geltung kommen sollen — nun, ganz gewiß, es ist das Leben mancher genialischen Menschen außeror­dentlich tragisch, aber daß Genies nun wirklich in die Welt werden hineinwirken können, daß Genies gemäß ihren durch die Geburt mitbekommenen Anlagen zur Geltung kommen können, das kann nur in einem freien Geistesleben sich begeben, denn nur da wird wirkliches Geistesleben sein.

C'est là que l'on pourra dépasser ce qui, aujourd'hui, n'est pas artistique au sens le plus éminent du terme. N'est-ce pas, des choses comme la Renaissance et le gothique, c'étaient des catégories qui étaient fondamentalement conçues à partir d'une réalité pleinement vivante. C'était la vie, et la vie est toujours quelque chose d'universel. Et c'est pourquoi Monsieur Uehli avait tout à fait raison lorsqu'il disait que quelque chose comme le gothique et la Renaissance était né de tout le contexte social de l'époque. Les divisions que nous avons récemment dans le domaine artistique sont en fait, je dirais, de plus en plus purement artificielles, et elles sont apparues parce que le principe de la vie bourgeoise s'est prolongé dans la vie spirituelle. N'est-ce pas, la vie bourgeoise a produit des rentiers, c'est-à-dire des gens qui ne font rien et qui vivent de la rente de leur fortune.

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Da wird man dann auch hinauskommen über dasjenige, was heute ja im eminentesten Sinne unkünstlerisch ist. Nicht wahr, so etwas wie Renaissance und Gotik, das waren Kategorien, die im Grund genommen aus einer voll lebendigen Wirklichkeit gefaßt waren. Es war Leben, und Leben ist immer etwas Universales. Und daher hatte Herr Uehli vollständig recht, wenn er davon sprach, daß so etwas wie Gotik und Renaissance herausgeboren war aus dem ganzen sozialen Zusammenhang der damaligen Zeit. Die Spaltungen, die wir neuerdings auf künstlerischem Gebiet haben, sind ja eigentlich, ich möchte sagen immer mehr und mehr rein künstlich entstanden, und sie sind deshalb entstanden, weil das Prinzip des bourgeoisen Lebens sich in das geistige Leben hinein fortgesetzt hat. Nicht wahr, das bourgeoise Leben hat Rentiers, das heißt Nichtstuer hervorgebracht, die von ihren Vermögensrenten leben.

Je pense ainsi : s'ils avaient juste assez d'ambition, ils devenaient des artistes. Mais il ne s'agit pas de créer quelque chose qui soit une sorte de nécessité humaine, il s'agit de créer quelque chose à partir de l'ambition humaine, qui, même si elle est généralement niée, est néanmoins présente. Et c'est là que se déracine alors - comme l'a très bien dit M. Uehli - l'aspiration artistique proprement dite.

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Ich meine so: Wenn die gerade genug Ehrgeiz hatten, wurden sie Künstler. Aber dabei handelt es sich ja nicht darum, etwas zu schaffen, was eine irgendwie geartete menschliche Notwendigkeit ist, sondern es handelt sich darum, etwas aus dem menschlichen Ehrgeiz zu schaffen, der, wenn er auch gewöhnlich abgeleugnet wird, dann doch vorhanden ist. Und da entwurzelt sich dann — wie von Herrn Uehli ganz richtig gesagt wurde — das eigentliche künstlerische Streben.

L'aspiration artistique intérieure, qui est tout à fait honnête et vraie, ne peut pas du tout se déraciner, mais la vie artistique peut naturellement se déraciner de tout ce qui est abstrait dans la vie - si la vie se déracine tout court.

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Das innere künstlerische Streben, das ganz ehrlich und wahr ist, kann sich im Grunde genommen gar nicht entwurzeln, aber aus allem Abstrakten im Leben kann sich das künstlerische Leben natürlich entwurzeln — wenn sich das Leben überhaupt entwurzelt.

Et dans une telle vie artistique déracinée, des choses qui ont leur fondement dans les vrilles de la vie, et non plus dans la vie elle-même, apparaissent alors les mots-clés/slogans "impressionnisme", "expressionnisme" et du genre.

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Und in einem solchen entwurzelten künstlerischen Leben, da kommen dann Dinge, die in den Ranken des Lebens ihre Begründung haben, nicht mehr im Leben selbst, es kommen dann die Schlagworte «Impressionismus», «Expressionismus» und dergleichen.

Ce sont des choses chez lesquelles on a toujours la nécessité de les réunir d'abord à nouveau - parce qu'elles sont tellement hachées les unes des autres -. Lorsque l'on parle d'impressionnisme et d'expressionnisme, ce ne sont que des gabarits, des mots. Mais lorsque nous parlons de notre eurythmie, nous devons - n'est-ce pas, puisque ces choses sont là - transformer les expressions en impressions et les impressions en expressions. C'est extrêmement important que l'on se rende compte que de tels mots clés, de telles abstractions doctrinales comme "impressionnisme" et "expressionnisme", apparaissent en fait toujours lorsque la vie originelle n'est pas là. Car de tels mots - on peut les appliquer à tout. Qu'est-ce qui n'est pas de l'expression ? Si quelqu'un fait un mauvais poème, c'est aussi une expression, si quelqu'un éternue, c'est aussi une expression. Et on peut donc finalement tout qualifier d'expression, même le bâtiment de Dornach. Mais ce n'est pas cela qui compte, ce qui compte c'est que l'on caractérise les choses à partir d'une base de vie concrète. On ne recourra alors pas à des slogans, mais on arrivera à des choses qui peuvent être en quelque sorte sérieuses.

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Das sind Dinge, bei denen man immer die Notwendigkeit hat, sie erst wiederum — weil sie so auseinandergeschnitzelt sind — zusammenzubringen. Wenn man von Impressionismus und Expressionismus redet — das sind ja alles nur Schablonen, Worte. Aber wenn wir von unserer Eurythmie reden, dann müssen wir — nicht wahr, weil diese Dinge nun da sind —, dann müssen wir in der Eurythmie die Expressionen wieder zu Impressionen und die Impressionen wieder zu Expressionen machen. Das ist außerordentlich wichtig, daß man sich klar darüber wird, daß solche Schlagworte, solche lehrhaften Abstraktionen wie «Impressionismus» und «Expressionismus», eigentlich immer dann auftreten, wenn das ursprüngliche Leben nicht da ist. Denn solche Worte — man kann sie auf alles anwenden. Was ist denn keine Expression? Wenn irgend jemand ein schlechtes Gedicht macht, so ist es auch eine Expression, wenn irgend jemand niest, so ist es auch eine Expression. Und so kann man schließlich alles, auch den Dornacher Bau, als eine Expression bezeichnen. Aber darauf kommt es nicht an, sondern darauf kommt es an, daß man die Dinge aus einer konkreten Lebensunterlage heraus charakterisiert. Dann wird man nicht zu Schlagworten greifen, sondern zu Dingen kommen, die irgendwie ernsthaftig gemeint sein können.

Je veux faire une comparaison : dans la Société Théosophique, on parle de "l'égalité des religions". Si quelqu'un en arrive à des abstractions telles que l'égalité ou l'unité des religions, alors on en arrive aussi à des abstractions terribles dans d'autres domaines, de sorte que l'on pourrait dire par exemple : eh bien, tout ce qui se trouve sur la table est un "ingrédient alimentaire". - De même que dans l'indouisme, le persanisme, le théosophisme, le judaïsme, on peut dégager partout la même chose, on peut aussi se baser sur la même chose pour le poivre, le sel, le paprika et d'autres choses encore, à savoir "ingrédient alimentaire".

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Ich will einmal vergleichen: In der Theosophischen Gesellschaft wird von der «Gleichheit der Religionen» geredet. Wenn nun jemand zu solchen Abstraktionen kommt wie Gleichheit oder Einheit der Religionen, dann kommt man auch auf anderen Gebieten zu solchen furchtbaren Abstraktionen, so daß man zum Beispiel sagen könnte: Nun ja, alles, was auf dem Tisch steht, das ist «Speisezutat». — So wie man im Indertum, im Persertum, im Theosophentum, im Judentum überall ein Gleiches herausschälen kann, so kann man nämlich auch bei Pfeffer, Salz, Paprika und noch bei anderen Dingen das Gleiche zugrundelegen, nämlich «Speisezutat».

Mais on s'aperçoit vite que ce qui compte, c'est le concret, sinon il pourrait arriver que l'on sale le café et que l'on sucre la soupe. Il s'agit d'avoir la volonté d'aller vers le concret. Mais il est également vrai qu'en matière d'art, les catégories apparues récemment sont au fond perçues comme quelque chose de particulièrement obscur. Je ne suis pas du tout d'avis de condamner tout ce que font les individus qui se nomment expressionnistes - parce qu'il faut bien que de tels noms existent -. Au contraire, je crois même que je peux avoir un cœur très large et que je peux même avoir un cœur pour de telles réalisations expressionnistes que d'autres personnes considèrent comme quelque chose de collé ensemble. Mais la théorisation, qui se rattache à de telles choses, me semble vraiment éloigner les humains d'une base de vie saine. Et il est vrai qu'aujourd'hui, beaucoup d'humains ne connaissent plus la vie qu'à travers des sources dérivées. Il y a des humains qui ne connaissent pas la vie, mais qui connaissent Ibsen ou Tolstoï ou Rabindranath Tagore, qui commence à devenir une sorte de mode dans les cercles qui ne peuvent pas s'approprier leur propre jugement. Et quand on regarde toutes ces choses aujourd'hui, quand on voit comment les gens se débattent dans les méandres de la vie, on ressent comme une nécessité de souligner une fois de plus comment, dans un organisme social sain - et ce doit être le triarticulé - comment ce déracinement doit justement cesser. De ce point de vue, certaines remarques de M. Uehli m'ont semblé d'une signification toute particulière.

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Aber da sieht man bald, daß es auf das Konkrete ankommt, sonst könnte es einem passieren, daß man den Kaffee salzt und die Suppe zuckert. Es handelt sich darum, daß man den Willen hat, auf das Konkrete einzugehen. Dann ist es aber auch wiederum so, daß man gerade beim Künstlerischen die Kategorien, die in der neuesten Zeit aufgetreten sind, im Grunde genommen als etwas ganz besonders Rankenhaftes empfindet. Ich bin durchaus nicht auf dem Standpunkt, nun das alles, was die Einzelnen leisten, die sich Ex­pressionisten nennen — weil es schon einmal solche Namen geben muß —, das alles zu verdammen. Im Gegenteil, ich glaube sogar, daß ich ein sehr weites Herz haben kann und daß ich sogar ein Herz haben kann für solche expressionistische Leistungen, die andere Menschen als etwas Zusammengekleistertes ansehen. Aber das Theoretisieren, das angeknüpft wird an solche Dinge, das scheint mir wirklich die Menschen von einer gesunden Lebensgrundlage wegzuführen. Und es ist ja heute tatsächlich auch so, daß viele Menschen das Leben eigentlich nur noch aus den abgeleiteten Quellen kennen. Es gibt Menschen, die nicht das Leben kennen, sondern Ibsen kennen oder Tolstoi kennen oder Rabindranath Tagore kennen, der jetzt in den Kreisen, die kein eigenes Urteil sich aneignen können, eine Art von Mode zu werden beginnt. Und wenn man heute auf alle diese Dinge sieht, wenn man sieht, wie die Leute in den Ranken des Lebens sich herumtreiben, dann empfindet man es schon als eine Notwendigkeit, daß einmal wiederum betont werde, wie in einem gesunden sozialen Organismus — und das soll der dreigliedrige sein — wie da eben dieses Entwurzeltsein aufhören muß. Von diesem Gesichtspunkte aus schien mir manche Bemerkung von Herrn Uehli von einer ganz besonderen Bedeutung.

Malheureusement, bien que j'aie parlé assez longtemps, je n'ai pas pu ajouter grand-chose de concret, car celui qui parle de ces choses avec un sens artistique - c'est ce qui est ressorti de l'intervention de M. Baumann - doit parler de telle sorte que parler de toutes les questions qui circulent aujourd'hui sur la position de l'artiste - par exemple s'il faut exposer ou non ou si les génies échouent ou non - est en fait assez inutile. Je pense que l'on devrait bien plus le reconnaître ; cela mènera alors à ce qui est juste. Si quelqu'un est un artiste, il peut aussi avoir faim, il peut aussi avoir un métier qui l'occupe du matin au soir ; il développera encore son génie artistique pendant la nuit.

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Ich habe leider, trotzdem ich lange genug gesprochen habe, im Konkreten nicht viel hinzufügen können, denn wer mit künstlerischem Sinn über diese Dinge spricht — das hat sich auch in der Rede des Herrn Baumann ergeben —, der muß eben so reden, daß das Reden über alle die Fragen, die heute so herumschwirren über die Stellung des Künstlers — zum Beispiel, ob man ausstellen soll oder nicht oder ob Genies versagen oder nicht —, eigentlich im Grunde genommen ziemlich zwecklos ist. Ich meine, man sollte das viel mehr einsehen; dann wird es schon zum Richtigen führen. Ist einer ein Künstler, dann kann er auch hungern, dann kann er auch einen ihn vom Morgen bis zum Abend beschäftigenden Beruf haben; er wird noch in der Nacht seine künstlerische Genialität entfalten.

Cela ne peut pas être supprimé. Si quelqu'un est un artiste, il vivra sa vie artistique, même s'il doit couper du bois ou cirer des bottes - il vivra sa vie artistique, même s'il ne la vit que pour sa propre chambre, pour sa propre armoire. Ce sont des choses qui ne peuvent absolument pas être traitées de manière rationnelle, qui devraient elles-mêmes, je dirais, être traitées de manière un peu artistique. Et le fait d'être traité de manière artistique exclut au fond la banalité, elle ne se laisse pas phagocyter. Et maintenant, n'est-ce pas, si l'on veut mettre l'humanité en général dans un ordre social, on ne peut pas intégrer par des paragraphes ou des principes ce qui ne dépend que de la génialité personnelle. En fait, même si l'on parle de la place de l'art dans la vie, il faut toujours avoir quelque chose d'un sentiment artistique, et alors les choses se transforment toujours en parole libre, en création libre ; on ne peut pas faire de distinction. Les choses qui sont si nécessaires à la vie ne peuvent pas s'isoler.

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Das läßt sich nicht unterdrücken. Ist einer ein Künstler, dann wird er sein künstlerisches Leben ausleben, auch wenn er sonst Holz hacken oder Stiefel putzen muß — er wird sein künstlerisches Leben ausleben, und wenn er es für nichts anderes auslebt als für sein eigenes Zimmer, für seinen eigenen Schrank. Es sind das Dinge, die durchaus eben nicht rational behandelt werden können, die selber, ich möchte sagen auch ein bißchen künstlerisch behandelt werden sollten. Und das Künstlerisch-behandelt--Werden schließt im Grunde genommen das Banausentum aus, das läßt sich nicht ver­philistern. Und nun ist es ja eigentlich so, nicht wahr, wenn man die allgemeine Menschheit in eine soziale Ordnung bringen soll, dann kann man nicht das, was eben nur an der persönlichen Genia­lität hängt, paragraphenmäßig oder prinzipienmäßig eingliedern. Man muß eigentlich immer, auch wenn man von der Stellung der Kunst im Leben redet, irgend etwas von einem künstlerischen Fühlen haben, und dann werden die Dinge eigentlich immer ins freie Reden, ins freie Schaffen übergehen; man kann da nicht ab­zirkeln. Da dürfen sich die Dinge, die für das Leben so notwendig sind, nicht abzirkeln.

J'aimerais dire qu'il est nécessaire de parler de l'art à partir de la sensibilité artistique et qu'il faut avoir un peu de philistinisme dans les veines - il n'est pas nécessaire d'en faire tout de suite trop - si l'on doit parler de ce qui est commun à l'humain. Car, mes très chers présents, ce serait grave dans la vie s'il y aurait seulement des humains qui seraient des artistes, ou si tous ceux qui pensent qu'ils devraient être reconnus comme artistes, s'ils étaient vraiment reconnus. J'aimerais savoir ce qu'il adviendrait alors de la vie. Le génie est certes nécessaire à la vie, mais la philistrosité est aussi déjà nécessaire à la vie. Et s'il n'y avait pas de philistrosité, il n'y aurait probablement bientôt plus de génie non plus. Les catégories "bon" et "mauvais" ne peuvent pas être appliquées sans plus à la vie, mais la vie est de façonnement multiple. On peut parler de beaucoup de choses, mais on ne devrait en fait rien dire d'autre que ce qui est pris dans la vie elle-même.

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Ich möchte sagen, es ist notwendig, daß man von der künstleri­schen Empfindung aus über die Kunst redet und daß man da schon einmal ein klein wenig von Philistrosität in seinen Adern hat — man braucht das ja nicht gleich zu schlimm zu machen —, wenn man von dem, was allgemein-menschlich ist, reden soll. Denn, meine sehr verehrten Anwesenden, schlimm wäre es im Leben, wenn es nur solche Menschen gäbe, die Künstler wären, oder wenn alle diejeni­gen, die glauben, daß sie als Künstler zu Anerkennung kommen sollten, wenn die wirklich zu Anerkennung kämen. Ich möchte wissen, was dann aus dem Leben werden sollte. Notwendig ist für das Leben allerdings die Genialität, aber notwendig ist für das Leben auch schon die Philistrosität. Und gäbe es keine Philistrosi­tät, so gäbe es wahrscheinlich sehr bald auch keine Genialität mehr. Es lassen sich die Kategorien «gut» und «schlecht» nicht so ohne weiteres auf das Leben anwenden, sondern das Leben ist vielgestal­tig. Reden kann man viel, aber man sollte eigentlich nichts anderes reden, als was aus dem Leben selber heraus genommen ist.




 

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SIXIÈME SOIRÉE DE DISCUSSION - Dornach, 30 août 1920 - -
L'ARTISTE DANS L'ORGANISME SOCIAL TRIARTICULÉ

Comment la question après la relation entre l'art et la vie sociale doit être correctement posée. Tri-articulation sociale comme une      condition préalable à l'épanouissement de l'artistique. Le dédommagement de l'artiste au sens de la cellule sociale primordiale. Génialité comme condition préalable à l'art véritable. Les non-concepts « impressionnisme » et « expressionnisme ».      Parler sur l'art ne va pas sans sentiment artistique. Sans philistrosité pas de génialité.


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Ernst Uehli s'exprime en introduction sur le thème "L'artiste dans l'organisme social triarticulé". Une discussion s'ensuit, au cours de laquelle Paul Baumann pose la question à Rudolf Steiner :
02
Paul Baumann : Quel est le rapport entre l'artiste, respectivement sa prestation de travail, et la cellule sociale originelle ? N'a-t-il pas aussi des prestations de travail à fournir pendant les périodes de préparation ?
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Rudolf Steiner : Lorsqu'il s'agit de l'art et de la vie sociale, j'ai toujours un certain sentiment d'insatisfaction lors d'une discussion concernant ces deux choses, pour la simple raison que déjà toute la façon de l'attitude de la pensée, de l'attitude de l'âme, qui entre en ligne de compte lorsqu'on parle de façonnement social, de structure sociale, doit être quelque peu différente de celle que l'on doit avoir lorsqu'on parle de l'art, de sa juste origine dans la nature humaine et de sa mise en valeur dans la vie, devant les humains.
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Dans un certain sens, les deux domaines ne sont pas vraiment comparables. Et c'est précisément parce qu'ils ne le sont pas - non pas parce qu'ils le sont, mais parce qu'ils ne le sont pas - qu'il me semble que l'on peut éclairer toute la position de l'art par rapport à l'artiste et à l'humanité, précisément du point de vue de la triarticulation de l'organisme social. Lorsque l'on parle de l'art dans l'organisme social, il ne faut pas oublier un seul instant que l'art fait partie des plus hautes fleurs de la vie humaine et que tout ce qui est nuisible à l'art ne peut pas être compté parmi les plus hautes fleurs de l'organisation de la vie humaine. Et c'est ainsi qu'il faut dire : s'il est possible à un organisme social triarticulé de façonner la vie en général de telle sorte que l'artiste et l'art puissent émerger de cette vie, ce sera une certaine épreuve pour la justesse, et aussi pour la justification interne de la triarticulation de l'organisme social. Mais on ne pourra pas bien se poser la question : comment faut-il aménager l'un ou l'autre aspect de l'organisme social triarticulé pour parvenir à une gestion correcte de l'art ou à une mise en valeur correcte de l'artiste ? Avant toute chose, la question se pose : comment les humains vont-ils vivre dans l'organisme social triarticulé ? On peut dire que si l'idée de la triarticulation de l'organisme social était une idée utopiste quelconque, on pourrait naturellement dire ce que l'on dit des utopies : les humains vivront heureux - aussi heureux qu'il est possible de l'être. - Or, l'idée de la triarticulation de l'organisme social ne part pas du tout de telles conditions utopistes, mais elle demande simplement : quelle est la structure conforme à la nature, la structure évidente de l'organisme social ?
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On pourrait donc bien se représenter qu'un humain quelconque ait l'idée que l'humain en tant que tel pourrait être beaucoup plus beau qu'il ne l'est, et que la nature n'a pas vraiment tout fait pour rendre l'humain suffisamment beau. Oui, mais comme le monde est dans son ensemble, l'humain a dû devenir ce qu'il est. Il se peut bien sûr qu'un Lénine ou un Trotski dise que l'organisme social doit être comme ceci ou comme cela. - Mais cela n'a aucune importance. Il n'est pas non plus important que quelqu'un se représente une autre nature de l'humain que celle qui peut naître de l'ensemble de la nature. Ce qui compte, ce sont les lois internes que doit avoir l'organisme social. Et si l'on comprend l'organisme social triarticulé d'un point de vue tout à fait pratique, on peut déjà gagner une représentation de ce qui sera possible dans cet organisme social triarticulé. Avant tout, une certaine utilisation économique du temps sera possible dans l'organisme social triarticulé, sans que l'on ait besoin d'une obligation de travailler ou d'autres belles choses de ce genre, qui éradiqueraient complètement toute liberté. Il sera tout simplement impossible, grâce aux choses qui se produiront dans l'organisme social triarticulé, que tant d'humains traînent inutilement comme aujourd'hui. Je sais qu'avec ces mots "traîner inutilement", on provoque des malentendus, car les gens diront : "Oui, les véritables traînards, les véritables bourlingueurs de la vie, ils sont très peu nombreux. - Mais ce n'est pas cela qui compte, ce qui compte, c'est de savoir si les gens qui font beaucoup font quelque chose d'absolument nécessaire à la vie, s'ils font quelque chose qui s'insère rationnellement, fructueusement dans la vie.
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Si vous saisissez de l'œil aujourd'hui n'importe quelle branche de la vie - je veux tout de suite en soulever une qui est la plus fragile dans la vie d'aujourd'hui - si vous considérez par exemple le journalisme et que vous voyez combien de force de travail humain est nécessaire, depuis le compagnon typographe jusqu'à tous les autres qui sont occupés avec de la réalisation des journaux. Prenez tout cela ensemble qui est fourni là de travail - la plus grande partie de ce travail est effectuée par des bourlingueurs de la vie, car la plus grande partie de ce travail est en fait un travail inutile. On peut faire tout cela de manière plus rationnelle, sans occuper autant d'humains. Il ne s'agit pas de laisser s'occuper le plus grand nombre possible d'humains afin qu'ils puissent vivre, mais de faire en sorte que, dans le sens d'un véritable cours de cycle de vie social, ces emplois nécessaires au bon développement de cette vie, de ce cycle social, soient exécutés. Tout ce qui apparaît aujourd'hui de chaotique en rapport à la valorisation de la force de travail humaine est lié au fait que nous n'avons pas vraiment d'organisme social, mais que nous avons en fait un chaos social provoqué par l'idolâtrie de l'État unitaire. J'ai souvent mis en avant des exemples de ce chaos social. Prenez seulement une fois combien de livres sont imprimés actuellement qui ne se vendent pas à cinquante exemplaires. Maintenant, prenez un tel livre --- combien d'humains sont occupés jusqu'à ce qu'il soit terminé ! Ils ont leurs ressources, mais ils font un travail tout à fait inutile. S'ils faisaient autre chose, ce serait plus intelligent et cela déchargerait d'innombrables autres humains d'un certain côté. Mais c'est ainsi que travaillent d'innombrables typographes, d'innombrables relieurs, ils font des piles de livres - la plupart du temps des poèmes lyriques, mais il y a aussi d'autres choses qui entrent en ligne de compte -, des piles de livres sont fabriquées ; presque toutes doivent être détruites. Mais ces choses inutiles sont nombreuses dans la vie d'aujourd'hui ; d'innombrables choses sont absolument inutiles.
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Qu'est-ce que cela signifie ? Pensez un instant que notre organisme humain ne serait pas correctement articulé en un système nerveux et sensoriel qui a sa localisation dans la tête, en un système rythmique et un système des membres qui collaborent de manière régulière et par cela œuvrent de manière économique. Pensez un instant que nous soyons un être unitaire qui se mélange partout, où l'on fabrique partout des choses inutiles et qui doit tout évacuer rapidement : les organes d'évacuation dont l'humain dispose aujourd'hui pour des choses inutiles ne seraient pas du tout suffisants. Nous devons en tenir compte. Nous devons être conscients qu'il est important que cet organisme social soit structuré, qu'il soit effectivement organisé intérieurement selon des lois ; alors il sera aussi économique. Alors, le travail humain sera partout à sa place correcte et, avant tout, il ne sera pas exécuté de travail inutile.
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Qu'en résulte-t-il ? Les humains auront du temps. Et alors, mes chers présents, alors la base est d'abord donnée pour des activités libres telles que l'art et d'autres choses similaires. Pour cela, il faut du temps. Et c'est à partir du temps que viendra ce qui doit être là pour l'art, et l'art œuvrera alors conjointement avec autre chose, il œuvrera conjointement avec la libre vie de l'esprit. Cette vie libre de l'esprit a pour but de développer les talents en même temps que le temps disponible dans l'organisme social triarticulé - non pas d'une manière perverse comme c'est le cas aujourd'hui, mais d'une manière conforme à la nature. Si l'organisme spirituel libre est vraiment séparé des autres organismes, le nombre de génies méconnus diminuera considérablement, car il y aura un développement beaucoup plus conforme à la nature. On s'adonnera beaucoup moins aux rêveries d'un quelconque art et autres choses de ce genre. Donc, l'épanouissement des talents sera simplement placé sur un terrain plus naturel grâce au développement de la libre vie de l'esprit. Et il y a encore autre chose qui est nécessaire si l'art devait s'épanouir : c'est du sens artistique, du besoin artistique, une envie et un désir conforme à la nature des humains pour l'art. Tout cela doit découler de l'organisme social triarticulé, comme ce qui naît justement lorsqu'il y a une cohabitation sociétale organisée, et non chaotique comme aujourd'hui. Vous voyez, c'est surtout à l'époque moderne que nous sommes entrés dans le chaos de la sensibilité artistique. Le sentiment artistique originel, qui jaillit avec une force élémentaire de la connaissance humaine, a totalement disparu sous l'effet de l'éducation moderne. Il reviendrait si nous nous développions dans le sens de la triarticulation de l'organisme social. Et c'est ainsi qu'il faut se représenter l'ensemble de ce qui naît là.
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Si l'on parle du point de vue de l'organisme social triarticulé, on doit parler seulement comme praticien et non en tant que théoricien, on n'a pas permission de demander après les principes, mais après les faits, et là on doit dire que ce que je viens d'évoquer peut arriver beaucoup plus vite qu'on ne le pense. Et qu'est-ce qui apparaît alors ? Des associations apparaissent alors pour les choses les plus diverses - en partie à partir de la vie de l'esprit, en partie à partir de la vie de l'économie. Et on ne devrait en fait pas se représenter ce que feront ces associations, emboîtées dans des paragraphes et des principes. Dans ces associations seront à nouveau des humains qui pourront émettre des jugements à partir de toute la chaleur de la sensibilité et de l'expérience humaines. Il proviendra de ces associations des humains qui, par ce qu'ils font par ailleurs dans la vie, se procureront une certaine importance dans la vie, qui ne leur sera pas garantie par l'État, ni par un titre de conseiller. Que les gens soient conseillers privés de la cour, conseillers d'entreprise, conseillers sanitaires et du genre, ce ne sont pas ces choses abstraites qui leur donneront une valeur dans l'organisme social triarticulé, mais ce qu'ils font, ce qui vit continuellement. C'est par les associations que les choses vivront ; ce ne sont pas les paragraphes qui vivront, mais ce qui résultera des négociations entre les personnes qui ont raison d'être dans les associations ; ce qui résultera, c'est ce qui existe actuellement sous forme de caricature en tant que soi-disant opinion publique. Il suffit de se représenter très concrètement ce qui peut résulter de l'interaction vivante des associations.
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Aux associations, appartiennent aussi celles qui viennent de la libre vie de l'esprit. Oui, il y aura effectivement à nouveau quelque chose dans l'expérience de vie d'un humain, qui peut fixer les choses comme un jugement justifié. Et si vous prenez cela dans sa signification la plus concrète, voici ce qui va se passer : l'artiste pourra vraiment conquérir ce qui est matériel pour son œuvre d'art à partir de ce jugement public, mais qui viendra à validité à partir des associations. C'est à partir de ces conditions que pourra vraiment se développer ce qui permettra à un artiste, même s'il lui faut 30 ans pour réaliser une œuvre d'art, d'en obtenir suffisamment pour satisfaire ses besoins pendant les 30 ans nécessaires à la réalisation d'une nouvelle œuvre - ce qui, de toute façon, n'entre peut-être plus en ligne de compte lorsqu'il a déjà 60 ou 70 ans. Cela se produira. Il en résultera effectivement - si l'on prend toute la chose de manière non banale - que l'artiste pourra être indemnisé pour son œuvre d'art à partir d'un tel organisme social triarticulé au sens de la cellule économique originelle. Aujourd'hui, il ne peut pas être indemnisé pour la raison que là des prix non naturels sont disponibles. En fait, les humains ne peuvent pas payer à l'artiste ce qu'il devrait exiger s'il pense un peu à lui. Mais aujourd'hui, il pense : j'ai réalisé un tableau quelconque, et oui, si je reçois ne serait-ce qu'assez pour les trois prochains mois, alors je le prends - je ne peux bien sûr pas terminer une œuvre correcte en trois mois, mais les gens n'y comprennent rien -, et je pomperai à nouveau dans trois mois.
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Maintenant, ces choses-là ne se produiront, j'aimerais dire, que comme l'extrait suprême ; c'est pourquoi on ne peut pas vraiment discuter de ces choses à l'avance. Je trouve toujours que c'est une mauvaise chose de discuter de ces choses - n'est-ce pas, selon le théorème de Pythagore, le carré sur l'hypoténuse est en toutes circonstances égal aux carrés sur les deux cathètes, mais il est impossible, quand on a ce théorème, de parler à l'avance de tous les degrés possibles d'application, mais il sera valable partout. Il en va de même pour l'organisme social triarticulé. Il n'est pas possible de spécifier ce qui doit résulter de l'épanouissement le plus élevé de la vie sociale. C'est pourquoi une discussion sur ces choses est en fait malheureuse, car ce sont des domaines trop disparates - la vie sociale et la vie artistique. Mais si nous prenons les choses en détail, nous devons dire que quelque chose comme ce bâtiment de Dornach devait voir le jour, qu'il devait naître d'une certaine mission culturelle et civilisatrice du présent, de la reconnaissance de cette mission. Et j'aimerais dire : s'il y avait encore moins de personnes ayant la moindre idée de ce qui a été construit, sculpté et peint ici, il aurait quand même dû voir le jour d'une manière ou d'une autre. Mais cette construction n'a bien sûr pu voir le jour que parce que les moyens matériels étaient là, mais elle ne pourra être achevée que si d'autres moyens matériels sont disponibles. On ne peut pas parler de ces questions en disant : oui, quelque chose doit être fait - car le mot "devoir", lorsqu'on parle de ces choses, a au fond quand même une toute autre signification. Et ainsi je pense qu'il faut avant tout être très clair sur le fait que la liberté du mouvement humain, qui est nécessaire pour donner à l'art son fondement correct, sera provoquée par l'organisme social triarticulé. Et ce n'est que lorsque les bases naturelles de la vie sociale seront en place que chaque humain pourra s'enraciner correctement dans cette vie sociale. En fin de compte, il s'agit vraiment plus de la chose que des mots.
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Vous voyez, je me souviens par exemple des années quatre-vingt du siècle dernier. Nous étions à l'époque du développement artistique bourgeois extérieur, où le théâtre était dominé par les comédies d'un Paul Lindau, d'un Blumenthal, de ceux qui mettaient sur scène de la paille de comédie, de tragédie ou de théâtre ; nous étions dans la dernière phase, n'est-ce pas, de la peinture conventionnelle et ainsi de suite. À cette époque, un livre a été publié par un humain d'une étroitesse d'esprit sans limite — un humain dont on ne pouvait vraiment pas dire autre chose que : il ne peut être qu'étroit d'esprit, même en le voyant de l'extérieur. - Et ce livre, qu'exigeait-il donc ? Il n'exigeait rien de plus urgent que, oui, que cet art même que nous avons eu là, cet art théâtral, cet art sculptural, cet art musical, etc. — Tout cela n'a pas de fondement social, c'est déraciné, et tout doit à nouveau être formé à partir du social. C'étaient des phrases terriblement belles, mais c'était en fait des choses terriblement tristes, car elles ne prenaient racine nulle part dans la vie. C'est pourquoi j'aimerais déjà dire qu'aujourd'hui, il ne s'agit pas de dire des choses correctes sur de telles choses, mais de ressentir de manière correcte la nécessité réelle de la vie, et cela signifie qu'il faut ressentir la nécessité de la transformation, de la nouvelle formation de la vie. Dans ce domaine, il est donc nécessaire d'attirer l'attention sur le fait que nous devons avant tout sortir de la phrase. Et c'est pourquoi, quand on parle de la triarticulation de l'organisme social, on comprend d'abord cette triarticulation de l'organisme social elle-même; les autres choses se donneront alors.
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Je crois qu'au fond, on parle déjà de l'art de manière incorrecte, si on parle absolument beaucoup de lui. Dans l'art, on devrait peindre, dans l'art, on devrait sculpter, dans l'art, on devrait construire, mais on devrait en fait parler le moins possible sur l'art. Bien sûr, il y a certaines façons de parler de l'art, mais cela doit être quelque chose d'artistique. Il existe bien sûr aussi un art des pensées. Il y a donc quelque chose d'aussi légitime dans les œuvres d'art de la pensée que dans les autres arts, l'art de la peinture et ainsi de suite. Mais ce qui est produit artistiquement est quand même - si l'on considère la création - quelque chose dont on ne peut pas dire qu'il doit être produit de telle ou telle manière ou qu'il doit être reçu de telle ou telle manière, mais là, toute la nécessité de la vie doit se transformer en une sorte d'évidence. Il est nécessaire de se familiariser avec l'idée que s'il n'y a pas de génie, il ne peut pas y avoir d'art correct. - Dans ce cas, toutes les discussions sur la manière dont l'organisme social doit être organisé pour que l'artiste soit mis en valeur de la bonne manière ne servent à rien. On peut alors tout au plus dire : dans un organisme social qui sinon va quand même correctement, il y aura un art correspondant s'il y a le plus de génies possible ; alors il y aura déjà un art correct. - Mais ils doivent d'abord être là, ces génies. Et comment ils doivent se mettre en valeur - eh bien, il est certain que la vie de certains humains de génie est extraordinairement tragique, mais que les génies puissent vraiment agir dans le monde, que les génies puissent se mettre en valeur selon les dispositions qu'ils ont reçues à la naissance, cela ne peut se produire que dans une libre vie de l'esprit, car c'est seulement là qu'il y aura une véritable vie de l'esprit.
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C'est là que l'on pourra dépasser ce qui, aujourd'hui, n'est pas artistique au sens le plus éminent du terme. N'est-ce pas, des choses comme la Renaissance et le gothique, c'étaient des catégories qui étaient fondamentalement conçues à partir d'une réalité pleinement vivante. C'était la vie, et la vie est toujours quelque chose d'universel. Et c'est pourquoi Monsieur Uehli avait tout à fait raison lorsqu'il disait que quelque chose comme le gothique et la Renaissance était né de tout le contexte social de l'époque. Les divisions que nous avons récemment dans le domaine artistique sont en fait, je dirais, de plus en plus purement artificielles, et elles sont apparues parce que le principe de la vie bourgeoise s'est prolongé dans la vie spirituelle. N'est-ce pas, la vie bourgeoise a produit des rentiers, c'est-à-dire des gens qui ne font rien et qui vivent de la rente de leur fortune.
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Je pense ainsi : s'ils avaient juste assez d'ambition, ils devenaient des artistes. Mais il ne s'agit pas de créer quelque chose qui soit une sorte de nécessité humaine, il s'agit de créer quelque chose à partir de l'ambition humaine, qui, même si elle est généralement niée, est néanmoins présente. Et c'est là que se déracine alors - comme l'a très bien dit M. Uehli - l'aspiration artistique proprement dite.
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L'aspiration artistique intérieure, qui est tout à fait honnête et vraie, ne peut pas du tout se déraciner, mais la vie artistique peut naturellement se déraciner de tout ce qui est abstrait dans la vie - si la vie se déracine tout court.
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Et dans une telle vie artistique déracinée, des choses qui ont leur fondement dans les vrilles de la vie, et non plus dans la vie elle-même, apparaissent alors les mots-clés/slogans "impressionnisme", "expressionnisme" et du genre.
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Ce sont des choses chez lesquelles on a toujours la nécessité de les réunir d'abord à nouveau - parce qu'elles sont tellement hachées les unes des autres -. Lorsque l'on parle d'impressionnisme et d'expressionnisme, ce ne sont que des gabarits, des mots. Mais lorsque nous parlons de notre eurythmie, nous devons - n'est-ce pas, puisque ces choses sont là - transformer les expressions en impressions et les impressions en expressions. C'est extrêmement important que l'on se rende compte que de tels mots clés, de telles abstractions doctrinales comme "impressionnisme" et "expressionnisme", apparaissent en fait toujours lorsque la vie originelle n'est pas là. Car de tels mots - on peut les appliquer à tout. Qu'est-ce qui n'est pas de l'expression ? Si quelqu'un fait un mauvais poème, c'est aussi une expression, si quelqu'un éternue, c'est aussi une expression. Et on peut donc finalement tout qualifier d'expression, même le bâtiment de Dornach. Mais ce n'est pas cela qui compte, ce qui compte c'est que l'on caractérise les choses à partir d'une base de vie concrète. On ne recourra alors pas à des slogans, mais on arrivera à des choses qui peuvent être en quelque sorte sérieuses.
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Je veux faire une comparaison : dans la Société Théosophique, on parle de "l'égalité des religions". Si quelqu'un en arrive à des abstractions telles que l'égalité ou l'unité des religions, alors on en arrive aussi à des abstractions terribles dans d'autres domaines, de sorte que l'on pourrait dire par exemple : eh bien, tout ce qui se trouve sur la table est un "ingrédient alimentaire". - De même que dans l'indouisme, le persanisme, le théosophisme, le judaïsme, on peut dégager partout la même chose, on peut aussi se baser sur la même chose pour le poivre, le sel, le paprika et d'autres choses encore, à savoir "ingrédient alimentaire".
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Mais on s'aperçoit vite que ce qui compte, c'est le concret, sinon il pourrait arriver que l'on sale le café et que l'on sucre la soupe. Il s'agit d'avoir la volonté d'aller vers le concret. Mais il est également vrai qu'en matière d'art, les catégories apparues récemment sont au fond perçues comme quelque chose de particulièrement obscur. Je ne suis pas du tout d'avis de condamner tout ce que font les individus qui se nomment expressionnistes - parce qu'il faut bien que de tels noms existent -. Au contraire, je crois même que je peux avoir un cœur très large et que je peux même avoir un cœur pour de telles réalisations expressionnistes que d'autres personnes considèrent comme quelque chose de collé ensemble. Mais la théorisation, qui se rattache à de telles choses, me semble vraiment éloigner les humains d'une base de vie saine. Et il est vrai qu'aujourd'hui, beaucoup d'humains ne connaissent plus la vie qu'à travers des sources dérivées. Il y a des humains qui ne connaissent pas la vie, mais qui connaissent Ibsen ou Tolstoï ou Rabindranath Tagore, qui commence à devenir une sorte de mode dans les cercles qui ne peuvent pas s'approprier leur propre jugement. Et quand on regarde toutes ces choses aujourd'hui, quand on voit comment les gens se débattent dans les méandres de la vie, on ressent comme une nécessité de souligner une fois de plus comment, dans un organisme social sain - et ce doit être le triarticulé - comment ce déracinement doit justement cesser. De ce point de vue, certaines remarques de M. Uehli m'ont semblé d'une signification toute particulière.
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Malheureusement, bien que j'aie parlé assez longtemps, je n'ai pas pu ajouter grand-chose de concret, car celui qui parle de ces choses avec un sens artistique - c'est ce qui est ressorti de l'intervention de M. Baumann - doit parler de telle sorte que parler de toutes les questions qui circulent aujourd'hui sur la position de l'artiste - par exemple s'il faut exposer ou non ou si les génies échouent ou non - est en fait assez inutile. Je pense que l'on devrait bien plus le reconnaître ; cela mènera alors à ce qui est juste. Si quelqu'un est un artiste, il peut aussi avoir faim, il peut aussi avoir un métier qui l'occupe du matin au soir ; il développera encore son génie artistique pendant la nuit.
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Cela ne peut pas être supprimé. Si quelqu'un est un artiste, il vivra sa vie artistique, même s'il doit couper du bois ou cirer des bottes - il vivra sa vie artistique, même s'il ne la vit que pour sa propre chambre, pour sa propre armoire. Ce sont des choses qui ne peuvent absolument pas être traitées de manière rationnelle, qui devraient elles-mêmes, je dirais, être traitées de manière un peu artistique. Et le fait d'être traité de manière artistique exclut au fond la banalité, elle ne se laisse pas phagocyter. Et maintenant, n'est-ce pas, si l'on veut mettre l'humanité en général dans un ordre social, on ne peut pas intégrer par des paragraphes ou des principes ce qui ne dépend que de la génialité personnelle. En fait, même si l'on parle de la place de l'art dans la vie, il faut toujours avoir quelque chose d'un sentiment artistique, et alors les choses se transforment toujours en parole libre, en création libre ; on ne peut pas faire de distinction. Les choses qui sont si nécessaires à la vie ne peuvent pas s'isoler.
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J'aimerais dire qu'il est nécessaire de parler de l'art à partir de la sensibilité artistique et qu'il faut avoir un peu de philistinisme dans les veines - il n'est pas nécessaire d'en faire tout de suite trop - si l'on doit parler de ce qui est commun à l'humain. Car, mes très chers présents, ce serait grave dans la vie s'il y aurait seulement des humains qui seraient des artistes, ou si tous ceux qui pensent qu'ils devraient être reconnus comme artistes, s'ils étaient vraiment reconnus. J'aimerais savoir ce qu'il adviendrait alors de la vie. Le génie est certes nécessaire à la vie, mais la philistrosité est aussi déjà nécessaire à la vie. Et s'il n'y avait pas de philistrosité, il n'y aurait probablement bientôt plus de génie non plus. Les catégories "bon" et "mauvais" ne peuvent pas être appliquées sans plus à la vie, mais la vie est de façonnement multiple. On peut parler de beaucoup de choses, mais on ne devrait en fait rien dire d'autre que ce qui est pris dans la vie elle-même.