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Collection: 09 - Nationalisme et âmes de peuple
Sujet : Sexualisation de la politique par la langue.
 
Les références Rudolf Steiner Oeuvres complètes GA180 154-165 (1980) 05/01/1918
Traducteur: Editeur: SAF

 

Elles ont ainsi donné naissance, entre autres choses l'attachement sentimental, passionnel, envers la nation. Le chauvinisme est le reste d'impulsions qui étaient autrefois vécues sous une toute autre forme, c'est seulement quand on pénètre au fond de ces choses qu'on en saisit toute la vérité. Car, qu'exprime le sentiment national passionné, de quelles forces procède-t-il ? Des mêmes que la sexualité, mais sous une forme différente. Être chauvin, c'est, pourrait-on dire, cultiver une sexualité collective. Quand les forces sexuelles gagnent l'homme tout entier, elles donnent naissance au chauvinisme ; la même force qui produit la conception, la génération, se manifeste dans l'amour passionné de la nation. C'est pourquoi le cri de guerre de ce qu'on appelle "la liberté des peuples à disposer d'eux-mêmes" ne prendrait son sens exact que si l'on disait : "l'appel à la résurrection nationale dans la perspective du problème sexuel". Que ce problème soit exposé aujourd'hui sur la place publique dans une forme déterminée sans que les gens pressentent comment dans leur subconscient, ces mots de "liberté des peuples à disposer d'eux-mêmes" dissimulent une impulsion sexuelle, c'est là un des secrets de notre époque ; à l'origine des évènements catastrophiques actuels, il y a, bien plus souvent qu'on ne le croit, des impulsions sexuelles obscures. Car les forces qui sont à la base de ce qui arrive aujourd'hui sont en partie très profondes.
A notre époque, ces vérités ne doivent plus être mises sous le boisseau. Certaines confréries ont pu le faire parce que, au sens le plus strict du mot, elles ont exclu les femmes. Bien que le travail avec les femmes amène assez souvent toutes sortes d'inconvénients, le temps est pourtant venu où, sur ces choses, des vues justes, des vues d'ensemble doivent gagner les esprits. Et cependant, des idées impures, insensées, stupides, se répandent parce que la connaissance de faits plus immatériels ne vient plus éclairer le sens de bien des choses qui ne sont plus, envisagées aujourd'hui que sous l'angle sexuel. Et vous le voyez ici, une vérité pure, authentique, noble, touche d'un certain côté à la manière de penser la moins pure, la plus dépravée, comme le montrent parfois les applications déformées de la psychanalyse ou d'autres théories du même genre. Vous constaterez toujours que ce qui est, d'une part, une vérité juste, et profonde, n'a guère besoin qu'on en change beaucoup les termes pour prendre un [256] sens dépravé et devenir une notion répugnante, aberrante et condamnable.
On pouvait dans les temps anciens parler de "nations", à l'époque où on les concevait elles avaient leur génie protecteur l'une dans Orion, l'autre dans une autre étoile ; on savait qu'il fallait se conformer aux impulsions des constellations. On se référait en quelque sorte à un ordre céleste ; aujourd'hui, il n'y a plus d'ordre céleste, et quand on fait appel au pur instinct national, au nationalisme échevelé, on fait passer au premier plan une force psychique sexuelle avant tout, c'est-à-dire une impulsion luciférienne attardée.

Si l'on veut voir clair et net dans ce qui se passe de nos jours, il ne faut pas s'aveugler sur les fondements réels de la vérité. En même temps, on peut distinguer pourquoi les hommes la redoutent tant. Supposons qu'ils soient amenés à entendre ceci : toutes les clameurs en faveur de la "liberté des peuples à disposer d'eux-mêmes" sont le fruit d'impulsions sexuelles. Ce sont des choses que l'humanité devrait apprendre aujourd'hui, mais qu'on ne veut pas entendre ; vous le savez, des choses qui sont noires, on prétend qu'elles sont blanches, et vice-versa. La raison en est que, depuis cette ancienne époque dont j'ai parlé, l'humanité a évolué jusqu'à notre cinquième civilisation post-atlantéenne, au cours de laquelle s'est peu à peu répandue l'abstraction. A l'époque de transition qui sépara la quatrième de la cinquième civilisation, on s'est interrogé avec angoisse, les âmes les plus élevées se sont interrogées sur la valeur de l'abstraction dans la connaissance. Lisez dans "Les Enigmes de la Philosophie" ce que j'ai écrit sur le MoyenÂge, sur le réalisme et le nominalisme. La pensée abstraite était déjà si développée qu'on se demandait ceci : l'idée que j'ai en tête, désigne-t-elle encore quelque [157] chose en dehors de moi ou bien n'est-elle qu'un mot ? Aujourd'hui on ne réfléchit plus à cela. En quoi cela intéresse-t-il les gens qu'au Moyen-Âge les hommes se soient tourmentés à propos de l'abstraction de la pensée, du rôle que jouaient dans le monde les "universaux", les idées générales ? On n'y pense plus parce qu'on s'est déjà habitué à l'abstraction et qu'on n'essaye pas d'en sortir, mais au contraire de s'y enfoncer tout à fait.
Pour finir, la querelle prit cette tournure : les universaux, les idées générales, sont d'abord des concepts précis existant en Dieu ; ce sont les « universaux ante rem ». Puis les concepts sont dans les choses « universaux in re ». Et ensuite les concepts sont dans notre esprit, dans notre âme « post rem », « universaux post rem ». C'était un moyen de se faire une opinion sur cette question : pendant qu'il pense, pendant qu'il ne pense que des concepts, l'homme est-il rattaché à la réalité ? On sentait encore confusément que dans les temps anciens, l'homme était uni à la réalité cosmique ; qu'en devenant pubère, il pouvait penser ce qu'il avait, dans son enfance, simplement perçu. Et qu'il savait ainsi que l'homme vrai venait de pénétrer en lui. A l'époque des universaux, il a fallu se battre les flancs pour établir si la pensée humaine avait encore un lien avec la réalité spirituelle, ou si elle en était complètement détachée, complètement isolée. Depuis ce temps, l'homme a dû s'habituer à considérer les universaux, les concepts, comme des abstractions, et dans sa conscience, il s'est plus ou moins isolé de la réalité.