S. Eisenhut - L’affection respiratoire comme problème de démocratie

Institut pour une triarticulation sociale
(version française du site allemand)
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Die Drei 6/2020.  (Traduction Daniel Kmiecik revue par F.G.
relecture au 20/08/2020 22:30)

Stephan Eisenhut

L’affection respiratoire comme problème de démocratie

Une considération intermédiaire au sujet de l’actualité



« Toutes les forces de guérison reposent notoirement et originairement
dans le système respiratoire humain. […] Et tous les secrets de la guérison
sont en même temps les mystères de la respiration. » ( 1 )

La vie de droit se réduit à une vie de pouvoir, lorsqu’elle ne reçoit pas d’impulsions émanant de la vie spirituelle de manière correcte. Une tâche de la pédagogie Waldorf consiste à guider l’attention sur le développement de l’être humain médian. Si cela ne réussit pas dans le temps de leur scolarité, ainsi les êtres humains se voient livrés sans protection aux images extérieures. ( 2 ) Dans cette considération intermédiaire, on montre comment la sensibilité au droit est en train de virer en ce moment même au sentiment de peur qui détruit la démocratie. Et on indique, à l’appui d’un exemple tiré de la libre vie de l’esprit, quelle voie de guérison est possible.

La crise du coronavirus scinde l’humanité. Les uns redoutent l’expansion d’une maladie nouvelle, qui pourrait causer de graves répercussions de santé, voire même la mort de beaucoup d’êtres humains et requérir des mesures énergiques pour endiguer le risque d’infection. Les autres ressentent directement ces mesures comme problématiques sous de multiples considérations. L’épidémiologiste renommé, Sucharit Bhakdi, s’est positionné très tôt sur ce problème. Avant le début du confinement strict [Lockdown, en anglais dans le texte, ndt] déjà, il caractérisa de telles mesures comme autodestructrices et insensées. Parce qu’il ne rencontra alors aucun écho, il ouvrit son propre canal Youtube et s’adressa directement à l’opinion publique au travers de trois vidéos. Cela eut des répercussions : « Le 18 mars 2020, l’homme mit en jeu sa réputation. Il se dit abandonné et aux mains d’une opinion publique inconnue, impondérable » ( 3 ), écrit Kathrin Gerlof, au sujet de Bahakdi, dans un article de l’hebdomadaire Der Freitag. Ses vidéos rencontrèrent beaucoup de soutien et certes de côtés totalement divers. Pour les médias publics légitimes, il devint par contre inquiétant. Ils ne parlèrent pas avec lui, mais sur lui :
Ils le dénommèrent Faktencheck et informèrent en passant que, vu le nombre de ses publications scientifiques, son avis est possiblement surestimé en tout cas. Des collègues spécialistes prétendaient même que le bonhomme fût autrefois un microbiologiste réputé, mais qu’il se trouvait présentement déjà depuis huit ans en retraite. Avec cela il fut mis au rancard, ce qu’il n’avait pas choisi, mais dont il sera cependant difficile de ressortir. ( 4 )

L’article de Gerlof rend évidente — possiblement d’une manière non intentionnelle — la manière dont les médias du courant dominant tentent d’affecter l’image d’une personnalité : celui qui peut s’établir dans leur cadre apparaît comme « sérieux » ; ceux qui ne peuvent pas « coller » publient leurs messages sur Internet. Si des choses fausses viennent en plus s’y agréger, alors on peut l’estamper du sceau de « théoricien de la conjuration » d’autant plus aisément et le cas est réglé. — À ce sujet Gerlof commente :
Bhakdi, comme aussi le pneumologue Wolfgang Wodarg et d’autres scientifiques, sont devenus des têtes de Turcs pour de nombreuses personnes — et aussi pour ceux-là que nous tentons de catégoriser comme des « adeptes de la théorie de la conjuration », parce que la situation confuse de la mêlée ne semble saisissable que si au moins ils sont capables de tirer un tiroir/une case à eux. ( 5 )
Il faut en effet proposer un tiroir à l’opinion publique pour qu’elle ne perde pas l’orientation. Dans cette case on fourre tout un chacun qui ne défend pas ce qu’il est opportun momentanément de défendre. Les médias dominants, c’est égal qu’ils soient publics ou privés, ont en cela une énorme fonction de pilotage des consciences.

La presse comme « quatrième pouvoir »

Les dictatures se caractérisent du fait que les médias sont pilotés par l’état. Dans les démocraties occidentales, par contre, l’idéal s’est formé d’une liberté d’opinion et de la presse. On espère qu’ainsi une « organisation » indépendante du « système de la presse » [NdtDK Pressewesen ; les guillemets sont du traducteur, car l’existence d’un tel système serait de toute manière problématique] mènerait à un processus de formation d’opinion chez les citoyens de bas en haut qui exercerait un contrôle supplémentaire, à côté du Parlement et des tribunaux. Dans ce sens les médias furent aussi décrits comme une sorte de « quatrième pouvoir ».
La représentation d’un système de la presse dirigé par des personnalités d’éditeurs privés et responsables qui sert d’organe de perception, en quelque sorte de ce que le peuple de l’État pense, s’est avérée une illusion au 19e siècle déjà. L’historien Heinrich Treitschke observait, en 1861 déjà, que les ennemis de la liberté se servaient des armes de leurs adversaires :

Depuis les tribunes de nos chambres, avec la presse libre dont ils sont redevables aux Libéraux, à coups de slogans qu’ils saisissent au vif de la parole de leurs opposants, ils soutiennent des oppositions qui, menées à bonne fin, devaient réduire à néant toute liberté de la presse et toute vie parlementaire. ( 6 )
La liberté de la presse peut précisément mener à ce que « l’opinion publique » devienne l’instrument de ceux qui dominent les médias. Ils peuvent à cela se rendre utile une particularité que Treitschke formula ainsi :

La classe moyenne hait toute tyrannie ouvertement violente, pourtant elle est très encline, à tout mettre au ban par les foudres de l’excommunication de l’opinion publique, de ce qui s’élève au-dessus d’une mesure moyenne de l’éducation, de la noblesse d’âme, de l’intrépidité. L’amour de la liberté qui la caractérise et qui lui confère en soi la disposition politique la plus capable ne peut que trop aisément dégénérer en agrément paresseux, en zèle machinal et indolent à masquer et farder toutes les oppositions de la vie spirituelle et à ne tolérer de travail intense que dans le domaine de l’action matérielle (l’improvement ! [en anglais dans le texte, idée « d’amélioration, développement, aménagements, embellissements, réaménagement, rénovation, perfectionnement, ndtDK]). ( 7 )
À partir de cette raison, Treitschke voyait la nécessité de compléter les idées de Wilhelm von Humboldt pour une limitation de l’état. Car l’état n’est pas le seul danger pour la liberté personnelle ; une « opinion publique tyrannique » en est encore un ( 8 ) autre aussi. Avec Humboldt, il était clair pour lui que cela a de funestes répercussions pour l’ensemble de la communauté lorsque « la pulsion égalitaire, qui a fait mûrir les fruits les plus précieux sur le domaine du droit commun, se fourvoie dans le domaine de l’éducation individuelle (Gebiet der individuellen Bildung) » ( 9 ). Car elle s’empare de l’afflux de ce qui ne peut être conquis que dans une liberté individuelle. Mais il pressentait que ce danger ne provenait pas simplement de l’état politique, mais qu’il venait encore aussi d’une couche plus profonde. Il place l’État-gouvernement-[pouvoir central] (Staat-Regierung-[Zentralgewalt]) pour ainsi dire, entre une « libre société des esprits beaux et distingués » (freie Gesellschaft schöner und vornehmer Geister) ( 10 ), de laquelle émane des impulsions constructives et le domaine de l’opinion publique tyrannique (tyrannischen öffentlichen Meinung) qui menacent autant l’état qu’aussi la société.
« L’opinion publique impondérable » que décrit Kathrin Gerlof — et celle à laquelle s’est exposé Sucharit Bhakdi, pour ainsi dire sans protection, en faisant prévaloir une opinion individuelle — trouve son fondement dans l’être humain inférieur. Or celui-ci est relié aux forces de la vie économique. Ici prend naissance un terrain qui est labouré et organisé par la presse. L’idéal auguste, selon lequel un grand nombre de journalistes explorent et publient effectivement l’opinion du peuple, à savoir, ce que celui-ci pense de l’action des gouvernants, est une illusion étrangère à la réalité. Les mass medias (Massenmedien) configurent beaucoup plus des atmosphères. Ils causent de ce fait eux-mêmes ce qui doit valoir comme opinion publique. De cette manière, ils deviennent de fait un « quatrième pouvoir ». Mais ce pouvoir est cependant difficile à localiser. Car il n’est contrôlé ni par le peuple ni par l’état. Bien plus, ce pouvoir contrôle aussi bien le peuple qu’aussi l’état. La question énigmatique c’est de savoir qui a la capacité de le piloter lui-même.

La maladie et la peur

La plupart des gens n’ont ni la force ni le temps pour juger de manière adéquate de la multitude des problèmes auxquels ils sont rappelés par les nouvelles quotidiennes des médias. Déjà les obligations matérielles de la vie quotidienne représentent pour eux un grand défi. Le monde est rempli de menaces : l’ouvrier a peur de perdre son emploi, l’entrepreneur craint pour son insolvabilité. Les informations au sujet de la nouvelle souche de virus-corona engendrent une peur souterraine. Car il s’agit ici d’une menace insaisissable de la vie personnelle. Si une telle peur — qu’elle soit justifiée ou non — est seulement attisée, alors un grand nombre d’humains de l’État se voient dans le devoir. C’est l’heure des hommes et des femmes (NdtFG politiques) « à poigne ».

Pendant la crise du corona, des prises de position toujours de nouveau critiques des spécialistes ont été publiées dans tous les mass medias, ce qui facilita la prise de connaissance par le public. Mais ce n’est pas là-dessus que repose l’effet des médias, car ces prises de position sont vite oubliées. L’effet des médias sur les masses provient de la répétition multiple d’une conception/façon de voir déterminée : des taux croissants d’infection, une seconde vague et autres choses du même genre, que l’on peut lire ou entendre ici ou là. Celui qui ne veut pas se former un jugement, parce qu’il se sent surmené par la vie, part donc en quête d’une autorité [un leader, comme disent les Anglais, ndtDK] qui lui dit alors ce qu’il doit penser. Les médias dominants proposent à foison ce genre « d’autorités ». De la plus haute autorité jouissent ainsi ceux-là mêmes qui occupent une fonction officielle. La déclaration du chef des autorités étatiques du Robert-Koch-Institut [RKI] pèse infiniment plus que celle d’un professeur émérite [… des claques ! De toute manière ! NdtDK] — à moins que le chef du RKI n’éveillât la mauvaise grâce des médias dirigeants par ses déclarations. Auquel cas, une campagne médiatique peut se déclencher qui peut rapidement le forcer à se retirer. Des politiciens se voient donc aussi exposés à cette impondérabilité des médias. ( 11 )

Un document stratégique confidentiel

À la fin-mars 2020, émergèrent dans quelques journaux les premières allusions à un document stratégique confidentiel émanant du ministère fédéral de l’Intérieur (BMI) qui fut publié le 1er avril sur le site Internet : fragenstaat.de. (12 ) Entre temps, le document se trouve aussi sur la page d’accueil du site du BMI. ( 13 ) Le document est très explosif, parce qu’il renferme des formulations qui faisant allusion à une panique dans la population, censée être attisée de manière consciente par un scénario worst-case [en anglais dans le texte pour « scénario du pire », ndtFG]. Il y était question d’un « effet de choc souhaité », qui devait être visé. On était produire des images de malades gravement atteints, refusés par les hôpitaux en raison d’un manque de capacité d’accueil, qui devaient ensuite mourir chez eux « en luttant pour surmonter une atroce détresse respiratoire ». Il est souligné dans le document que « l’asphyxie ou bien le manque absolu d’air sont une peur primordiale chez tout être humain ». ( 14 )

Ce que le journal Frankfurter Allgemeine Zeitung sait rapporter sur l’établissement de ce document est toutefois beaucoup plus intéressant. Le ministre fédéral de l’intérieur, Horst Seehofer — qui fut lui-même atteint par le parvovirus B19 en 2002 et traversa alors une grave maladie — se sentit par conséquent très précocement sensibilisé aux possibles répercussions médicales graves du Sars-CoV-2. Il avait donc exhorté ses services dès janvier à prendre ce danger très au sérieux et prié la division principale de son ministère, en février, « de prendre plus précisément en considération la situation dans les autres pays et le danger pour l’Allemagne ». Par conséquent, il avait donné l’ordre d’élaborer un document stratégique censé bien éclairer le scénario worst-case [« du pire », en anglais dans le texte, ndtDK]. Ce fut fait en trois jours et présenté le 22 mars — ce jour même, donc, où les présidents des Länder et la Chancelière décidèrent des restrictions de sortir de chez soi [équivalent allemand moins strict que le confinement français, en particulier sans surveillance et sanctions policières encourues en cas de non-respect motivé. NdtDK]. ( 15 )
Ce qui est énigmatique à cette description, c’est le moment où le document est censé avoir été élaboré. Car les tableaux — par exemple « de malades graves, refusés par les hôpitaux en raison du manque de capacité d’accueil » — ne devaient pas du tout avoir été générés à ce moment-là. Car les médias y avaient déjà œuvré en anticipation eux-mêmes, sans avoir besoin d’une stratégie provenant du ministère de l’Intérieur. ( 16 ) Pour quelle raison fut donc encore réuni ensuite un groupe de dix spécialistes afin d’élaborer une stratégie correspondante peu avant la décision du Lockdown [en anglais dans le texte pour désigner le strict confinement cette fois, mais toujours sans contrôle policier, en Allemagne, où l’on a encore confiance dans le citoyen ! NdtDK] ?

Or il y a à ce propos une indication importante dans la FAZ : Horst Seehofer eut à combattre, en tant que ministre fédéral de la santé (1992-1998), un scandale de la transfusion sanguine. Il prit alors la « résolution de dissoudre l’administration fédérale de la santé existante jusque-là et d’appeler à la rescousse le RKI [Institut Robert Koch, Koch fut l’alter ego allemand de Pasteur en France, chacun de ces deux grands chercheurs du 19e siècle a donc un Institut portant son nom, de part et d’autre du Rhin magnifié par Victor Hugo ! ndtDK]. Sa doctrine, qu’il forgea à cette époque : « Qui sous-estime le danger peut ne pas survivre politiquement. » ( 17 ) Ce document peut-il donc avoir eu un tout autre but ? Fût-il éventuellement censé avoir donné aux présidents des Länder une orientation pour leur décision ? Le message du document se laissât dès lors formuler de la manière suivante : Nos spécialistes — qui sont tous bien « resserrés en réseau » [(gut vernetzt), d’où les guillemets du traducteur] dans les réseaux transatlantiques ( 18 ) — ont donc exploré exactement dans ces derniers jours, quelles positions scientifiques satisferont l’opinion publique. Ce sont ceux qui estiment comme réaliste un scénario worst-case [en anglais dans le texte pour « le pire scénario, ndtDK]. Voulez-vous politiquement survivre, alors vous devez apporter votre voix au paquet de mesures proposé.
Une semaine seulement après le Lockdown [confinement, voir ci-dessus, ndtDK], les médias entreprirent de rapporter avec bienveillance et de diffuser les recommandations du document en question. ( 19 ) Le flot de messages effrayants n'a pas cessé depuis lors. C'est comme la propagande de guerre, qui veut faire jurer la population d'un pays à une image ennemie.

Un parallèle

Pendant la Première Guerre mondiale, Rudolf Steiner mit en exergue à divers endroits l’importance de l’historien Treitschke, pour une compréhension correcte de l’état. Or celui-ci avait été déclaré « canaille principale » par la propagande de guerre anglaise, appuyée par le pamphlet d’Oxford édité par l’université d’Oxford, étant donné que Treitschke, qui avait pour thèse que le devoir le plus élevé de l’état était la conservation du pouvoir, eût ainsi posé le fondement spirituel du militarisme allemand. ( 20 ) Treitschke avait un lien profond avec le penser aristotélicien. Il avait lu, jeune étudiant déjà, tout spécialement à fond « Politique » l’ouvrage d’Aristote. L’éthique à Nicomaque et la Politique renfermaient des idées qui avaient été élaborées pour les forces de la gouvernance grecque future où l’on s’efforçait de juguler les forces de convoitise de l’être humain inférieur par la capacité de penser du même être humain supérieur, afin de trouver et de travailler à un domaine médian.
Or Treitschke n’était pas un penseur cérébral abstrait, il structurait plutôt une conception de l’histoire au moyen des forces du cœur. En outre, il se présentait comme poète, ce qui démontre pareillement combien il avait fortement façonné le système médian comme un organe permettant d’appréhender les choses. Steiner ne s’intéressait pas au point de vue national de Treitschke qui en association avec la notion d’état unitaire [une notion de promulgation étatique d’origine prussienne, ndtDK] est de fait problématique. Ce qui l’intéressait beaucoup plus, c’était la manière dont une telle personnalité apparaissait avec un « point de vue universellement humain ». ( 21 ) Et ici il était important pour lui que Treitschke n’argumentât pas dès lors à partir d’une théorie abstraite. Avec lui, on pouvait avoir le sentiment « que cela résultait du tréfonds de son âme, à l’instar de ce que Socrate désignait comme les forces d’un « démon ». Et de ce fait, aimerais-je dire, il fut ainsi guidé sur tout le sillage de sa vie » ( 22 ). Steiner reconnut chez Treitschke la faculté de s’associer par les forces du cœur à une énergie essentielle qui se trouve à son tour en lien avec l’esprit du peuple allemand. ( 23 ) Ce n’est qu’en cela qu’il aperçoit l’importance de celui-ci.
Un parallèle intéressant avec le temps présent c’est le fait que Steiner, avec sa brochure intitulée « Pensées pendant le temps de guerre », qui parut en 1915, déclencha de violentes contre-réactions même avec des personnalités avec lesquelles il était lié d’amitié. Ainsi, le jugement d’Édouard Schuré fut-il fortement imprégné par la propagande de guerre française au point de considérer les déclarations de Steiner [sur le moment, ndtDK] comme une prise de position unilatérale au profit de l’opinion du gouvernement allemand. ( 24 ) De la même manière des êtres humains qui estiment autrement que celle-ci, « la maladie ennemie », le virus-corona, se voient ainsi sermonnés à partir d’une sensibilité qui a été amenée par l’activité des médias, sans que l’idée véritable d’autrui en soit principalement perçue pour autant, bien au contraire.

Vie de droit et sensation de peur

La vie de droit se fonde sur la sensibilité/sensation de droit qui se façonne dans la vie des êtres humains ensemble. Une société dans laquelle est cultivée une libre spirituelle libre a une autre influence sur le développement de la sensibilité/sensation de droit, qu’une autre, dans laquelle — pour encore une fois parler avec Treitschke — « la pulsion égalitaire […] se fourvoie dans le domaine de l’éducation individuelle. » La nappe phréatique morale d’une société monte donc ou baisse, à chaque fois selon la manière dont la vie spirituelle peut librement se développer à l’intérieur de celle-ci.
Les sensibilités/sensations ont leurs fondements dans l’être humain inférieur qui, par le sang, est lié avec le métabolisme. Dans la partie précédente de cette série, on a montré comment l’être humain supérieur rentre par la respiration dans l’organisme corporel et reçoit de ce fait la possibilité d’y opérer en clarifiant l’être humain inférieur. ( 25 ) Or, si la respiration est perturbée/gênée, on en vient à de fausses sensations qui peuvent s’accroître en sentiments/sensations de haine.

La crise du corona est une crise de la respiration : le virus qui est avant tout une menace pour des êtres humains plus âgés, ayant déjà des troubles de santé, peut mener à une mort par asphyxie. Le management de crise de nombreux gouvernements tourne surtout autour de la mise à disposition de lits d’assistance respiratoire, en médecine intensive. Et pour la vaste population qui se voit confrontée à ces représentations, le souffle bloque au plus vrai sens du terme.
La société tombe ainsi dans une détresse respiratoire de l’âme. De nombreux êtres humains ne peuvent pas faire autrement que d’attaquer des opinions divergentes ou pour le moins, de les refuser. Leur jugement ne mûrit pas selon un processus dans lequel diverses considérations du monde sont « inspirées » pour être pénétrée d’une sensibilité propre, au contraire la sensibilité subjective vire aussitôt subitement [dans ce qu’on appelle un « coup de sang », ndtDK] d’une représentation achevée. Et celle-ci doit devenir aussitôt obligeante pour tous. Il en résulte dès lors le besoin d’un État total qui pénètre dans tous les domaines en les réglementant.
La démocratie de partis est aussi organisée de sorte que la plupart des Parlementaires sont poussés par une peur souterraine. Ils doivent en effet orienter leurs actions et leurs paroles de manière à survivre aux prochaines élections. À l’intérieur du parti, il y a en plus la lutte pour la bonne place sur la liste, vers l’extérieur en direction des voix des électeurs. L’opinion publique doit être observée à cette occasion avec une grande acuité. Nombre de contemporains critiques avaient eu l’impression durant le Lockdown [en anglais dans le texte pour confinement strict, ndtDK] que dans ces circonstances, il n’existe plus d’opposition authentique qui puisse contrôler réellement les actes du gouvernement. ( 26 ) Selon toute apparence, il ne fallait attendre, dans l’état d’urgence sanitaire décrété contre le corona, aucune protection à l’encontre d’une forte intervention de l’exécutif.

Pouvoir d’état et équilibre du pouvoir

En fait les trois pouvoirs au sein de l’état devraient rester véritablement à tout moment en équilibre. Pourtant, de la même façon qu’il faut produire un courage énorme pour un parlementaire pour aller combattre à l’encontre de l’opinion publique, ici il faut, ici aussi à un juge, un courage énorme pour former un jugement. Pareillement ici c’est la peur qui domine en donnant le ton, par surcroît dans l’état actuel de l’édification de l’ensemble de l’appareil de justice de la construction allemande d’état qui est subordonné au gouvernement et n’est donc pas autonome. ( 27 )



Dans la tri-articulation de l’organise social de Rudolf Steiner, la division des pouvoirs semble à peine jouer un rôle. Dans l’ensemble de son œuvre, Montesquieu n’est en effet mentionné qu’une seule fois. On y rencontre purement et simplement une seule indication sur le fait qu’il comprend bien l’impulsion de celui-ci comme une tripartition et non pas comme une tri-articulation. ( 28 ) Or une tripartition formelle ne peut pas équilibrer les forces réelles de la vie. Les forces anabolisantes/constructrices et les forces catabolisantes/déconstructrices dans la vie sociale ensemble doivent être ressenties et comprises si elles sont censées être équilibrées. Les forces anabolisantes proviennent des « citoyens indépendants, disposant librement d’une qualité d’agir » en toute connaissance des causes ( 29 ). Steiner se rattache ici à des esprits comme Treitschke, Wilhelm von Humboldt et Schiller. Il est vrai que Treitschke croyait encore que cette « qualité d’agir librement » fût encore possible à l’intérieur des institutions étatiques. Steiner voit, par contre, la nécessité d’une claire séparation organique entre institutions spirituelles et institutions étatiques. Pour les institutions étatiques, il se rattache, il est vrai de nouveau, à une idée de Treitschke. Celui-ci voyait la nécessité d’un état qui se défende. Il ne donnait aucune chance aux petits états allemands pour s’affirmer vis-à-vis des grands États-nations de l’ouest comme de l’est. C’est la raison pour laquelle il prit position — à la grande irritation de son père, un général saxon — en faveur d’une Allemagne unie sous la direction de la Prusse et salua donc la fondation allemande de l’empire 1870/71.
La puissance de l’état est une réalité. L’état doit pouvoir protéger le droit envers l’intérieur comme envers l’extérieur. C’est la raison pour laquelle, il se fonde sur des facultés policières et militaires. Pourtant le pouvoir de l’état possède nonobstant une propriété qui est vraiment dangereuse : il construit sur une direction centrale qui donne des ordres de haut en bas. Les organes exécutifs sont pour ainsi dire les membres, le gouvernement est la tête. Ce qui fait défaut, c’est précisément un domaine médian équilibrant et conciliant. Or cet organe d’équilibre doit être configuré de telle manière qu’il soit réellement en situation d’équilibrer les forces sociétales.

Le Parlement comme fonction pulmonaire


Dans nos démocraties actuelles, les Parlements n’ont plus guère la possibilité de s’acquitter de leurs tâches véritables. Il y a un tout un nombre de raisons qui, dans leur combinaison font que les problèmes qui oppressent les humains ne réussissent plus à être « inspirés ni expirés » correctement. ( 30 ) L’une d’entre elles c’est qu’à l’exécutif on confie des tâches qu’il n’est pas capable du tout de maîtriser. ( 31 )

Cela se laisse élucider par l’exemple suivant : la question de la santé ne concerne pas simplement les êtres humains individuels. Lors de maladies hautement infectieuses, qui atteignent la dimension de pandémies, l’exécutif doit se trouver en situation d’imposer des mesures qui garantissent la sécurité de tous. Actuellement, l’exécutif détient cependant aussi les pleins pouvoirs de produire lui-même l’expertise sur une pandémie qui se présente. Il a créé pour cela des institutions correspondantes comme le RKI (Robert Koch Institut) et il en retire en plus des conseils extérieurs. C’est précisément à cet endroit que se fait sentir une contradiction dans la société. Car le choix des experts est de plus en plus ressenti comme un choix unilatéral.

Cela étant, à la question de savoir si une pandémie se présente réellement et quelles mesures doivent être prises, seuls des scientifiques peuvent répondre qui ont des expériences dans ce domaine et se trouvent au contact des praticiens qui eux doivent transposer ces mesures. Mais les scientifiques ne sont pas non plus des petits dieux qui-savent-tout, car ils défendent plutôt diverses opinions [et surtout la leur avant celles des autres! ndtDK]. Il serait donc foncièrement pensable que des comités se formassent à partir d’orientations médicales différentes, qui fussent certes indépendantes des exécutifs, mais qui entreprissent la tâche de se préparer à être capables de répondre rapidement et avec compétence aux questions qui ne manqueraient jamais de se poser en cas de crises. Ces comités pourraient être complétés ou modulés par d’autres comités de spécialistes. Il faudrait créer pour cela une institution de la libre vie de l’esprit, qui ne fut pas étatique, mais perçut néanmoins les tâches de la communauté. ( 32 )

Des mesures qui modifient ou limitent les droits des êtres humains doivent fondamentalement être légitimées à l’intérieur de la vie juridique. Précisément parce que les experts sont en désaccord sur de nombreux points et partent de divers fondements spirituels, il faut donc s’attendre à ce que des propositions très diverses soient dégagées par le travail et la réflexion d’expertise. Les organes de la vie juridique ont la tâche d’examiner avec soin ces propositions. Un parlement, dans lequel ce ne sont pas des partis, mais des êtres humains individuels qui sont élus, lesquels se sont avérés dignes de confiance dans leurs domaines de vie, peut produire un tel examen approfondi et attentif. Les députés ont la tâche sur des questions qui concernent la sûreté et l’égalité de tous les êtres humains « d’inspirer », pour le dire ainsi, de telles propositions et de les vérifier avec leur propre sensibilité juridique. Ils peuvent en débattre et à la fin aussi les voter. Le Parlement percevrait ainsi une réelle fonction pulmonaire qui lui revient au sein de l’organisme social. Car en tout ce qui doit valoir comme droit, il ne s’agit pas de vérités absolues, mais plutôt uniquement de ce qui est ressenti selon une sensibilité juridique dans une situation donnée. L’exécutif n’a quant à lui purement et simplement qu’à apporter le souci que les mesures décidées soient transposées ensuite de manière concrète.

Sensation du droit et autorité

Cette sensation de droit émerge de l’être humain inférieur, lequel est relié au métabolisme par les forces du sang. Or dans ce sang vivent des pulsions et convoitises sauvages qui sont aujourd’hui chauffées à blanc par les mass medias. Mais les impulsions morales y vivent aussi. Celles-ci sont d’autant plus éveillées que la vie de l’esprit peut librement se développer davantage. ( 33 )  Dans la vie de l’esprit, c’est le principe d’autorité qui prévaut. Car ce qui importe ici c’est ce que quelqu’un a acquis par son propre travail dans un domaine. Une vie de l’esprit est d’autant plus féconde que les diverses autorités entrent d’autant plus en relation les unes avec les autres dans un dialogue commun, apprennent mutuellement à vivre dans les situations des unes et des autres en se mettant d’accord de manière critique tout en se comprenant. ( 34 )
Dans la vie de droit, par contre, il s’agit de transposer ce qui concerne tous les êtres humains dans une mesure égale de sorte que cela rencontre la plus grande acceptation possible. Dans l’actuelle vie juridique, ses représentants ne peuvent pas se placer dans un rapport conforme aux faits avec les représentants de la vie de l’esprit. D’une part, l’exécutif par ses divers ministères défend lui-même de nombreuses fonctions qui ne peuvent être maîtrisables qu’au sein de la vie libre de l’esprit ; d’autre part, les mass médias produisent un « air », qui est si empoisonné qu’il agit sur l’ensemble de la population comme en la stupéfiant, mais aussi spécialement sur les représentants de la vie de droit. De ce fait les forces inférieures, qui vivent dans le sang, prennent ainsi de l’influence sur la configuration adoptée par les institutions du droit.
L’un se met à dépendre de l’autre. Or, « l’autorité spirituelle » ne doit en aucun cas déterminer immédiatement la vie de droit. Si elle le fait néanmoins, alors ce qui fut gagné par un effort spirituel libre, se voit reporté d’une manière fausse sur ce domaine-là, dont une condition de vie est l’égalité de tous les êtres humains. Cela engendre du mécontentement. Et celui-ci est le terrain nourricier pour le travail de décomposition des mass médias.

Si, en conséquence, on éliminait des ministères ce qui ne peut être élaboré qu’au sein de comités d’esprits libres, ainsi l’état se verrait réduit au peu d’organes exécutifs. Ceux-ci ont purement et simplement la tâche de créer les conditions préalables pour que le droit démocratiquement légal puisse être imposé de sorte que la sécurité et l’ordre en soient garantis. C’est exactement par ce moyen que serait atteint le fait que les Parlementaires pussent s’acquitter absolument de leurs tâches propres.

L’institution juridique en tant que cœur de l’organisme social


La vie publique rend nécessaires de nombreuses règles. Les moindres d’entre elles concernent la question de la sécurité et de l’égalité de tous les êtres humains. Or seules ces dernières peuvent être décidées en commun au sein d’un Parlement. Si le Parlement est surchargé de tâches qu’il est incapable de résoudre, ceci mène à une extinction de la sensibilité au droit. Si sa tâche se concentrait à limiter le pouvoir étatique à ce qui est nécessaire, alors une sphère pourrait naître entre la vie spirituelle et le pouvoir étatique politique, dans laquelle serait renforcée cette sensibilité juridique des êtres humains les uns pour les autres.



Les institutions centrales du droit (c’est-à-dire les lois) qui prennent naissance de cette sensibilité juridique forment un organe dans l’organisme social, un organe qui est comparable au cœur humain. Rudolf Steiner établit cette comparaison dans une séance de questions-réponses à l’issue d’une conférence spécialisée de Roman Boos :
 « Le droit présuppose, en effet, qu’un organisme existe tout d’abord et qu’au travers de cet organisme, un mouvement de vie et donc une circulation se produise — exactement comme le cœur présuppose que les autres organes existent tout d’abord afin qu’il puisse fonctionner. Or, l’institution juridique est en quelque sorte le cœur de l’organisme social et elle présuppose que d’autres forces soient déjà présentes. Et si l’on a un manque de clarté là-dedans, c’est tout à fait naturel aussi qu’il ne puisse y avoir ici de système juridique rigoureusement arrêté d’avance. Mais un système juridique rigoureusement structuré se réalisera précisément du fait qu’on laissera réellement se déployer, dans cette tri-articulation de l’organisme social, les forces propres et primordiales aux autres composantes de cet organisme. Par ce moyen des fondements seront d’abord posés qui pourront fournir une réelle formation du droit. » ( 35 )

On peut suivre conceptuellement de telles comparaisons si ces forces-là qui forment le système rythmique de l’être humain sont élevées au niveau réel d’une expérience personnelle. Si nous faisons du Parlement un organe pulmonaire sain de la vie sociale, dans lequel les députés se confronteront à ce qui est dit par les autorités diverses de la vie spirituelle au sujet d’un droit concernant les questions de la vie, alors il en résultera quelque chose d’autre à cette occasion qu’un droit qui se voit imposé en déférence à « l’opinion publique ». L’institution juridique peut alors devenir une expression de ce qui existe en impulsions morales dans le sang des êtres humains.
Rudolf Steiner en arrive ainsi à un partage plus radical du pouvoir que celui de Montesquieu. La limitation du pouvoir exécutif est atteinte de sorte que ses tâches se limitent à l’essentiel, tandis que le pouvoir législatif est amené à une relation correcte avec la vie de l’esprit, au lieu — comme aujourd’hui — d’être orienté sur l’opinion publique. La tâche du pouvoir judiciaire [Judicative, sur le schéma, ndt] par contre, peut ensuite être saisie avec tout le bon sens nécessaire, si elle est configurée à partir des forces de la vie de l’esprit. ( 36 ) En effet, de nombreuses questions de droit ne touchent pas du tout tous les humains dans la même mesure. Elles doivent être clarifiées en observant les contextes individuels.

Épilogue


Tandis que cet article était en train d’être rédigé, un document se frayait un passage vers le public qui avait été produit par un haut fonctionnaire de la BMI. Stephan Kohn, fut le représentant du chef de service du compte-rendu KM4, compétent pour la protection des infrastructures critiques en Allemagne. Sa tâche consistait à déclencher une alarme lorsqu’une menace était portée à sa connaissance. Étant donné qu’il tint possible une telle menace pour une partie de la population dans le domaine des « approvisionnements médicaux », en considération des mesures arrêtées, il commença à rechercher des conseils scientifiques extérieurs. À cette occasion, il se trouva en échange avec son prédécesseur direct, auquel il présenta un prérapport. ( 37 ) Il est vrai qu’au milieu de tout cela s’ensuivit un changement dans la direction du rapport.

Le médecin Gunter Frank, qui fut tout d’abord consulté sur ce problème, vit pareillement ce danger et en parla dans son réseau personnel à d’autres médecins et à un chercheur en science sociale, de bonne réputation. Il se forma ainsi [spontanément, ndtDK] une libre association spirituelle de scientifiques qui réfléchissant purement à partir du souci du bien-être de la population, collaborent ensemble pour dégager une évaluation de la situation. Au moment où ce document — qui présentait des aspects très préoccupants, en raison d’éventuelles nuisances collatérales des mesures prises — fut achevé, il tenta donc de le porter à la connaissance de son chef de service, le 25 avril. Il entra pour cela en contact avec le chef du bureau du ministre de l’Intérieur, auquel il remit son message écrit en l’accompagnant d’une prière de faire suivre. ( 38 ) Dans cet écrit, il explicita en détail sa motivation d’une manière à ce que l’on puisse aisément la comprendre. Il signala là-dessus que nombre de ses partenaires dialogiques au BMI confirmaient sa découverte, mais n’avaient pas le courage de le dire tout haut.
Le directeur du bureau refusa de faire suivre la lettre. Au lieu de cela, Kohn fut rigidement freiné dans son initiative par son prédécesseur, lorsqu’il tenta de transmettre son analyse critique à l’intérieur du ministère. Là-dessus il proposa le document à une évaluation par un diffuseur des ministres intérieurs des Länder. Quelqu’un parmi ceux qui le reçurent transmit le document au magazine Tichys Einblick..

La logique de l’exécutif est bel et bien en définitive celle des militaires : le subordonné doit obéir à son supérieur. Combien il est ardu de rompre une telle logique, c’est ce que Kohn décrivit dans sa lettre au ministre Horst Seehofer, à l’appui du manque de courage de ses collègues. Ceux-ci partageaient son discernement, mais ne voulurent rien entreprendre d’eux-mêmes. Mais à Seehofer aussi la liberté fit défaut de rompre avec la logique du système. Car il suspendit ce fonctionnaire du service avec pour motif que celui-ci avait diffusé une opinion privée à l’entête du BMI. ( 39 ) « Je ne partage pas les manières de voir du collaborateur quant à leur contenu », déclara-t-il. ( 40 )

Il est vrai que Seehofer ne semble pas avoir compris qu’il ne s’agissait pas de son opinion personnelle et des fondements spirituels de celle-ci, quand bien même celle-ci est identique avec l’opinion du gouvernement fédéral, ni non plus de celle de ses collaborateurs. C’est plutôt que des questions d’une énorme importance sociétale doivent être évaluées de manière neutre.
Les scientifiques consultés soutinrent, dans un communiqué de presse commun, la manière de procéder de Kohn et louèrent son acte conscient et responsable. Ils apprirent par contre avec étonnement le refus opposé à leurs expertises spécialisées. Il va de soi qu’elles méritaient d’être complétées, car ce n’étaient qu’un début. ( 41 ) Mais l’évaluation neutre qu’ils exigèrent ne serait cependant possible que si toutes les questions qui doivent être mues à l’intérieur d’une libre vie de l’esprit étaient vraiment retirées du domaine des tâches qui relèvent de l’exécutif.

Peut-être qu’une vertu s’éveillera à l’occasion de cette crise qui pourra faire naître un mouvement, précisément à partir de cet appel à guérir, qui s’engagera pour la libération de la vie de l’esprit. La démocratie peut seulement respirer sainement si la vie de l’esprit peut s’opposer à l’état comme une instance indépendante.



( 1 ) Rudolf Steiner : La participation à l’unisson du cours de l’année en quatre imaginations cosmiques (GA 229), Dornach 1999, p.75.

( 2 ) Voir Stephan Eisenhut : Vie juridique et sensibilité juridique. La Dreigliederung sociale comme tâche de la pédagogie Waldorf — Partie II dans Die Drei 5/2020. [Traduit en français et disponible sans plus auprès du traducteur (DDSE520.DOC), ndtDK] La présente considération intermédiaire se trouve dans le contexte de cette série.

( 3 ) www.freitag.de/autoren/der-freitag/zerstoerung-der-eindeutigkeit/

( 4 ) Ebd.

( 5 ) Ebd. [Il est intéressant ici d’aller relire les trois articles de Thomas Brunner diffusés à ce moment-là au sujet du corona (TBCO050420.doc, TBCO260320.doc et TBCO310320.doc) traduits en français et disponibles sans plus auprès du traducteur. NdtDK]

( 6 ) Heinrich von Treitschke : Die Freiheit [La liberté] dans, du même auteur : Ausgewählte Schriften [Recueils d’écrits choisis]. Tome 1, Leipzig 1920, p.7.

( 7 ) À l’endroit cité précédemment, p.13.

( 8 ) À l’endroit cité précédemment, p.14 : « Humboldt ne voyait le danger pour la liberté personnelle que dans l’état, c’est tout juste s’il pensait que la société des beaux et distingués esprits qui frayait avec lui, était la seule qui pût jamais empêcher la formation universelle de son esprit. Mais nous, nous savons désormais qu’il n’y a pas seulement une « sociabilité simple et libre », mais encore aussi une opinion publique tyrannique. »

( 9 ) Voir la note 7. [Le texte original en allemand placé entre parenthèses permet de s’orienter clairement sur la figure de Stephan Eisenhut ; ndt]

( 10 ) À l’endroit cité précédemment, p.14.

( 11 ) Le président partant du Tribunal constitutionnel fédéral, Andreas Voßkuhle fut violemment critiqué dans les médias après le jugement porté sur les achats d’emprunts de la BCE. Dans une interview avec le Zeit, il y va rudement avec ceux-ci. Il s’interroge au sujet de quel genre de culture de la discussion est-ce donc là, si ceux qui voient le jugement de manière critique se permettent déjà, dix minutes après l’annonce de ce jugement, de dire que cette décision serait complètement manquée. Il caractérise l’atmosphère de l’opinion publique allemande comme empoisonnée par les médias. Ce sont avant tout les politiciens qui le désolent, car le Tribunal constitutionnel fédéral garde quant à lui plus de distance vis-à-vis des médias que ceux-ci. Voir Erfolg ist eher kalt [ La réussite est plutôt glaciale] dans Die Zeit21, du 14 mai 2020, p.6.

( 12 ) https://fragenstaat.de/blog/2020/04/01/strategiepapier-des-innenministeriums-corona-szenarien/

( 13 ) « Wie wir COVID-19 unter Kontrolle bekommen [Comment nous arriverons à contrôler le COVID 19]www.bmi.bund.de/SharedDocs/downloads/DE/veroeffentlichungen/2020/corona/szenarienpapier-covid-19.pdf ?_blob=publicationFile&v=4

( 14 ) À l’endroit cité précédemment, p.13. Le soulignement est présent dans l’original.

( 15 ) https://zeitung.faz.net/faz/politik/2020-04-02/f8e7cb89e5590d367435a9fa8a0a702/?GEPC=s5 — Le groupe de travail rédigea le document à partir du 18 mars 2020, comme cela ressort de la source suivante : www.tagesschau.de/investigativ/ndr-wdr/corona-strategiepapier-szenarien-101/html

( 16 ) Le 25 février le médecin pneumologue Wolfgang Wodarg avait rédigé son article : Panikmacher isolieren [Isoler ceux qui fabriquent la panique] qui fut refusé par les grands journaux. (Voir : https://publikumskonferenz.de/blog/2020/03/18/loeseung-des-corona-problems-panikmacher-isolieren/) Wodarg, à la suite de ses années d’expérience politique, était déjà sensibilisé à la manière dont les médias fomentent une atmosphère qui sert en définitive les grosses entreprises pharmaceutiques. En tant que membre du Bundestag, le Parlement allemand, de 1994 à 2009, il fut « l’initiateur et orateur au sein de la commission d’enquête : Ethik und Recht der modernen Medezin [Éthique et droit de la médecine moderne], membre de la réunion parlementaire du Conseil de l’Europe, il y fut président de la sous-commission santé et représentant du président de la sous-commission pour la culture, l’éducation et la science. En 2009, il initia à Strasbourg, la sous-commission sur le rôle de la WHO [l’OMS en anglais dans le texte, ndt] dans la grippe A/H1N1 [grippe porcine transmissible à l’être humain, ndt] et après son départ du Parlement, il resta ultérieurement dans cette sous-commission au titre d’expert scientifique. Depuis 2011, il est libre enseignant universitaire, médecin et engagé en tant que spécialiste de la santé, membre honorifique du comité directeur et AG-Leiter [directeur d’une société par actions, ndt] (santé) auprès de Transparency International Allemagne. » — www.wodarg.com

( 17 ) Voir la note 15.

( 18 ) Dans l’article de la Faz quatre membres du groupe de spécialistes son désignés : Michaël Hüther et Hubertus Bardt de l’Institut der deutschen Wirtschaft [Insitut de l’économie allemande], par ailleurs Christoph M. Schmidt et Boris Augurzky du RWI-Leibniz-Institut pour la recherche économique. Le RWI-Leibniz-Institutest connut pour sa proximité avec l’Initiative Neue Markt-wirtschaft (INSM) [Initiative Nouvelle Économie de Marché]. Ainsi Schmidt est l’organisateur principal de la campagne de l’INSM contre un tournant décentralisé de l’énergie et la loi EEG (voir : www.pv-magazine.de/2020/02/28/die-kampagnen-gegen-die-dezentrale-energiewende-verstaerkt-weiter/). Hüther est pareillement membre du conseil d’administration de l’INSM et en outre dans le comité directeur de Atlantik-Brücke [Ponts d’Atlantique (lesquels sont déjà bien « trop loin » déjà de celui d’Arnhem… ndt] [voir : https://de.wikipedia.org/wiki/Michael_H%C3BC%BCther], un réseau d’élites, dont la caractéristique principale repose dans « la facilitation des rencontres personnelles entre les forces dirigeantes germano-américaines issues de la vie économie et de la vie spirituelle » et donc des gens qui veulent influencer massivement la politique allemande [https://de.wikipedia.org/wiki/Atlantik-Br%C3%BCcke].

( 19 ) Voir www.tagesschau.de/investigativ/ndr-wdr/corona-strategiepapier-szenarien-101.html

( 20 ) Voir Michael Kunzcik : Anti-deutsche Atrocity Propaganda mit Bildplakaten [Propagande anti-allemande sur l’atrocité avec affiches dans la Première Guerre mondiale, dans Heinz-Peter Preußer (éditeur) : Gewalt im Bild : Ein interdisziplinärer Diskurs [Puissance en image : Un discours interdisciplinaire], Marburg 2018, p.64. Rudolf Steiner écrivit à ce propos : Ces adversaires veulent voir en Treitschke une personnalité qui a influencé l’actuelle génération allemande de sorte qu’actuellement le peuple allemand se tienne pour le plus doué de tous les peuples dans toutes les orientations et veuille pour cette raison contraindre les autres à se subordonner à sa gouvernance, en plaçant donc l’acquisition du pouvoir au-dessus de tout droit. » — Rudolf Steiner : Essais au sujet de la Dreigliederung de l’organisme social et de la situation de l’époque 1915-1921 (GA 24), Dornach 1982, p.283.

( 21 ) Voir du même auteur : Considérations d’histoire contemporaine, volume III (GA173c), Dornach 2010, p.33.

( 22 ) À l’endroit cité précédemment, p.34.

( 23 ) Ebenda. [Voir aussi en allemand de ce qu’on a appelé, très récemment d’ailleurs « l’Allemagne secrète » (au travers des auteurs publiant dans la revue mensuelle Info3 de Francfort-sur-le-Main [par exemple : Rüdiger Sünner : Geheimes Deutschland [Secrète Allemagne]. Environ 90 min. 14.90 €, ISBN 3-89848-079-8 EAN : 4-021308-88794. Recension dans Info3 1/2007, traduite en français (IFRS0107.DOC) et disponible sans plus auprès du traducteur] Ndt]

( 24 ) Voir du même auteur : Considérations d’histoire contemporaine volume I, (GA 173a), Dornach 2010, pp.50 et suiv. & PP.316 et suiv.

( 25 ) Voir Stephan Eisenhut : Vie juridique et sensibilité juridique. La Dreigliederung sociale comme tâche de la pédagogie Waldorf — Partie II, pp.60 et suiv.— voire la présente note 2.

( 26 ) Un symptôme de cela c’est la croissance rapide des membres du parti « Widerstand 2020 » récemment fondé en Allemagne.

[En France, la majorité solidement en place bat aussitôt aussi le tambour de « l’union nationale » (de 1792) qui fait à n’importe quel prix table rase de toute résistance contre ce qu’on entreprend pour vaincre l’ennemi du moment (dont le sang qui va « abreuver nos sillons ! »). « Nous sommes en guerre ! » a bien répété plusieurs fois notre jeune président jupitérien ! Ndt]

( 27 ) Voir www.gewaltenteilung.de/#4

( 28 ) Rudolf Steiner : Qualité de contraste universel occidentale et orientale (GA 83), Dornach 1981, p.307.

[J’espère, chère lectrice et lecteur français que vous allez bien prendre note ici de l’impossibilité de mettre au même rang de sens ici « tripartition » et « Dreigliederung », même en français ! NdtDK]

( 29 ) Heinrich von Treitschke : Die Freiheit [La liberté], voire la présente note 7. [soulignement en gras de la « qualité d’agir » du traducteur pour signaler l’importance de ce point en ce qui concerne la libre vie de l’esprit. ndtDK]

( 30 ) La relation entre la respiration et le connaître a été explicitée dans Stephan Eisenhut : Vie juridique et sensibilité juridique. La Dreigliederung sociale comme tâche de la pédagogie Waldorf, voire la note 2.

( 31 ) D’une manière proéminente, ce problème est éclairé par la contribution de Johannes Mosmann : Le secret du pouvoir — la démocratie élargie, partie V, dans ce numéro de la revue aux pages 19-27. [Traduite en français (DDJM620.DOC) et disponible sans plus auprès du traducteur. NdtDK]

( 32 ) Il va de soi que des comités de ce genre devraient être aussi financés. Par une configuration modifiée des droits de propriété sur les biens-fonds, ce financement pourrait être aisément possible indépendamment de l’état.

( 33 ) Voir Stephan Eisenhut : Vie juridique et sensibilité juridique. La Dreigliederung sociale comme tâche de la pédagogie Waldorf, voire la note 2.

( 34 ) Voir du même auteur : Les bases de développement d’une libre vie de l’esprit — La Dreigliederung sociale comme tâche de la pédagogie Waldorf — Partie I dans : Die Drei 11/2019 [Traduit en français et disponible sans plus auprès du traducteur (DDSE1119.DOC), ndt]

( 35 ) Rudolf Steiner : Sciences spécialisées et anthroposophie (GA 73a), Dornach 2005, p.159.

( 36 ) Du même auteur : La question sociale (GA 328), Dornach 1977, p.63 & p.134. Le président partant du Tribunal constitutionnel fédéral, Voßkuhle décrit, dans l’interview mentionnée à la note 11, comment peut se dérouler avec succès l’élaboration commune parmi des juges disposant de la même justification pour y participer. Lui, en tant que président, n’a dès lors plus l’opportunité d’y exercer une influence ; il devrait « créer une culture, dans laquelle tout un chacun se fréquente mutuellement en estimant hautement la valeur d’autrui tout en anticipant la vie de cette culture. » Cette forme de travail ensemble est carrément caractéristique de la vie de l’esprit, dans laquelle justement des autorités spirituelles diverses doivent se rencontrer [dans ces conditions idéalement anticipées, ndtDK].

( 37 ) Voir www.acgut.com/artikel/das_corona_papier_so_war_es_wirklich_herr_seehofer

( 38 ) Ebenda.

( 39 ) www.bmi.bund.de/SharedDocs/pressemitteilungen/DE/2020/05/mitarbeiter-bmi-verbreitet-privatmeinung-corona-krisenmanagement.html

( 40 ) www.abendzeitung-muenchen.de/inhalt.mitarbeiter-des-bmi-suspendiert-brisantes-corona-papier-war-das-alles-richtig-so.b20f08c6-fd41-4c10-b01a-1995fb60aa2b.html

( 41 ) www.abendzeitung-muenchen.de/media.media.98cfe8dec-2b67-4861-899d-d12b7f65fgbe4.original.pdf